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Elsa Monségur : « Apprendre à redonner vie aux vêtements »

par Laura Coll
Elsa Monségur, la Textilerie
Elsa Monségur, la Textilerie
Style de vie Mode Publié le 22/11/2018
Café, boutique, recyclerie, atelier de couture... La Textilerie est un spot du textile éco responsable à Paris. Rencontre avec Elsa Monségur, cofondatrice de ce lieu niché au cœur du 10e arrondissement.

Quel est le concept de la Textilerie et de ses différents espaces ?

L’idée de la Textilerie est de rassembler différents produits et activités qui prennent du sens en formant une filière textile courte, circulaire et responsable. C’est la raison pour laquelle différentes zones sont réparties au sein de notre atelier, chacune consacrée à une activité propre. Nous avons une partie matières premières : tissus, produits textiles, vêtements et accessoires éco responsables de créateurs ou d’entreprises qui s’efforcent de faire les choses avec une traçabilité dans le processus de production et la connaissance des conditions d'une fabrication éthique. Une autre partie est consacrée à la recyclerie textile, qui consiste à collecter des vêtements apportés par des particuliers et auxquels on tente d’allonger la durée de vie. Une partie de ces vêtements y est ensuite revendue, plutôt à bas prix. Enfin, nous avons un espace atelier où du matériel de couture est mis à disposition. On y propose des cours, principalement de couture mais aussi parfois de pratique du textile comme le tricot, la teinture ou la sérigraphie. Lorsque aucun cours n’est dispensé, par exemple en journée, nous proposons cet espace à la location, pour des personnes qui ont un projet couture et ont besoin d’utiliser des machines.

 

Qui sont les acteurs de ce lieu et les rôles de chacun au quotidien ?

Le projet est né de ma rencontre avec Alice Merle, qui est déjà dans le secteur du textile puisqu’elle est à la tête d’un atelier d’insertion nommé Mode Estime qui confectionne des pièces pour des créateurs et a la particularité d’employer des personnes éloignées de l’emploi. Nos envies se sont donc rencontrées, jusqu’à créer ce lieu. Aujourd’hui Alice est présidente de la structure associative. Pour ma part, je ne fais plus partie de la gouvernance mais de l’équipe salariée, en tant que directrice coordinatrice. Je suis donc présente au quotidien, tout comme Karidja en charge du tri et de la vente et qui fait par ailleurs des créations avec des coupons de tissus ou de vêtements qui nous ont été donnés. Il y a aussi Clémence, professeure de couture et responsable des activités pédagogiques de l’atelier, et Clara qui, en service civique, est en charge de l’organisation des événements et du lien avec d’autres associations.

 

Quel est votre parcours et comment l’idée de la Textilerie a-t-elle vu le jour ?

En 2015, j’ai quitté mon emploi car je n’étais pas satisfaite de ma vie professionnelle. Ce fut un moment de réflexion qui m’a permis aussi de questionner mon rapport aux choses, notamment aux vêtements. Adepte de vêtements « fast fashion », pas chers, j’aimais aussi tout ce qui est vêtements de seconde main, ressourcerie, friperie. Je me suis dit qu'on était malades de cette façon de consommer… J’ai tous ces vêtements que je ne mets jamais, la machine à coudre de ma mère que je n’ai jamais utilisée. Pourquoi je n’essaierais pas de les transformer ? C’est comme ça que je me suis initiée à la couture et que je me suis prise d’intérêt pour les matières, la façon dont elles sont produites et dans quelles conditions. C’est une prise de conscience qui me permet d’être plus acteur et de changer mon comportement. J’ai alors décidé d’arrêter d’acheter du neuf et j'ai réfléchi à l'idée de mixer la récup’, de valoriser l’existant via la transformation et le développement de compétences autour de la couture. Lors de ma rencontre avec Alice, nos idées et envies ont fusionné.

 

Que pouvez-vous dire aux consommatrices de « fast fashion » qui pensent que tendances et vêtements éco responsables ne sont pas compatibles ?

Bon nombre de marques et d’initiatives prouvent le contraire avec des vêtements beaux, doux, agréables, désirables, et avec une patte créative intéressante. De plus en plus de marques s’inscrivent dans la « slow fashion », la mode éthique, et tentent de faire les choses de manière plus responsable, proposant davantage de traçabilité. Après, il y a l’offre absolument gigantesque de vêtements déjà existants à trouver dans les ressourceries, les friperies ou à la Textilerie. On y trouve de tout, des vêtements récents et en excellent état comme des pièces plus vintage. L’offre est très diversifiée, il y en a pour tous les goûts.

 

Les pièces proposées ici sont à la portée de toutes les bourses ?

Avec Alice, notre volonté a toujours été de proposer différentes solutions pouvant convenir à divers types de budget, mais aussi à différents types de motivation. Tout le monde n’a pas forcément envie de coudre, de confectionner ses vêtements, et puis acheter du tissu Bio a un certain coût. C’est la raison pour laquelle il était important pour nous d’avoir cette offre de redistribution gratuite dans les vestiaires, ou de vente à bas prix dans notre espace recyclerie. À côté de cela, nous proposons aussi quelques pièces de créateurs à un prix plus élevé certes, mais c'est le minimum syndical pour que ce modèles puissent essayer de vivre. La Textilerie résulte aussi de cette volonté d’avoir différentes solutions accessibles à différentes personnes.

 

Comment sont sélectionnés les créateurs dont vous vendez les pièces ?

Il y a deux critères. Le premier est l’attention portée aux matières, il s’agit soit de créateurs qui récupèrent des vêtements qu’ils transforment soit qui utilisent des tissus de créateurs qui utilisent du bio, du tencel, en d’autres termes des matières qui tiennent compte de l'impact écologique. Le second critère concerne les conditions de fabrication. Mises à part les culottes Holi qui sont fabriquées en Hongrie, tout le reste est fabriqué à Paris et en Ile de France. Nous proposons aussi des créations de salariés de Mode Estime et d'autres faites par nous-même à la Textilerie.

 

Vous participez, avec d’autres associations et entreprises au Green Friday avec le soutien de la Ville de Paris. Quel sera le programme de la Textilerie pour cette journée ?

Nous participons au Green Friday car nous faisons partie des structures qui portent ce mouvement nommé REFER, le réseau des ressourceries et des acteurs du réemploi solidaire. La journée du 23 novembre s’articulera en deux temps : l’après-midi, à partir de 14h, nous ferons un "Repair café" spécialisé dans le textile. Concrètement les gens viennent avec des tissus abîmés et on va leur apprendre comment les réparer, soit à la machine soit à la main. Ça peut être faire un ourlet, réparer le trou d’un jean, coudre un bouton… Des notions simples à la portée de tous. Le soir, de 19h 30 à 21h30, aura lieu un apéro-rencontre, une table ronde suivie d’un apéritif pour ceux qui le souhaitent. Il sera question de l’aval de la filière textile, de ce que deviennent les vêtements dont on se débarrasse, comment ils sont transformés, avec quel impact, positif ou négatif. Nous avons convié trois intervenants : Camille, qui fait partie du REFER, Anaïs Dautais Warmel de la marque Les récupérables et Valentin Loevenbruck qui travaille au sein du relais.

 

Des projets ?

Des projets on en a plein. On réaménage souvent l’espace, notre activité se prête à bon nombre de métamorphoses. Mais notre enjeu majeur reste de pérenniser cette structure qui est toute jeune, elle a un an d’existence.

 

Un message pour donner envie de découvrir la Textilerie...

Consommer moins mais mieux ! Au lieu d’acheter des vêtements tout faits et parfois mal faits, ici on peut s'exercer à les faire, les réparer, leur donner une nouvelle vie... Apprendre à valoriser l'existant.

 

La Textilerie 22 rue du Château Landon, 75 010 Paris 

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