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CNRS : les 80 bougies d’un faiseur de nouveaux mondes

par Pierre Magnetto
LLaurence Delbarre, ingénieur au laboratoire SCALab, teste devant l’œuvre de Mathieu Le Nain
LLaurence Delbarre, ingénieur au laboratoire SCALab, teste devant l’œuvre de Mathieu Le Nain "Le reniement de Saint Pierre", une technique d'enregistrement des mouvements oculaires. Cette innovation est mise à profit par les musées pour mieux comprendre la réception des images d’art.© Claire-Lise Havet/Musée du Louvre-Lens/IKONIKAT/CNRS
La première image de l’ombre d’un trou noir : le trou noir supermassif du centre de la galaxie M87, observé par le réseau EHT, n’aurait pu être obtenue sans le télescope de 30-mètres de l’Iram. Cette percée scientifique est le fruit d’une collaboration de près de deux cents chercheurs et ingénieurs sur toute la planète, © The EHT
La première image de l’ombre d’un trou noir : le trou noir supermassif du centre de la galaxie M87, observé par le réseau EHT, n’aurait pu être obtenue sans le télescope de 30-mètres de l’Iram. Cette percée scientifique est le fruit d’une collaboration de près de deux cents chercheurs et ingénieurs sur toute la planète, © The EHT
Analyse d'un échantillon de plastique prélevé sur la campagne Tara Méditerranée, en 2014. © Cyril Frésillon / OOV / LOV / CNRS
Analyse d'un échantillon de plastique prélevé sur la campagne Tara Méditerranée, en 2014. © Cyril Frésillon / OOV / LOV / CNRS
Equipement de protection individuel nécessaire à l'entrée dans ce laboratoire de confinement multipathogène où le VIH et
Equipement de protection individuel nécessaire à l'entrée dans ce laboratoire de confinement multipathogène où le VIH et " l'agent responsable de la tuberculose, sont étudiés afin de mieux comprendre les maladies associées. © Cyril Frésillion/ /IPBS/CNRS
Claire Voisin, mathématicienne, médaille d'or 2016 du CNRS,  titulaire de la nouvelle chaire consacrée à la géométrie algébrique au collège de France. © Patrick Imbert / College de France
Claire Voisin, mathématicienne, médaille d'or 2016 du CNRS, titulaire de la nouvelle chaire consacrée à la géométrie algébrique au collège de France. © Patrick Imbert / College de France
L'évaluation de la quantité de neige accumulée sur le glacier Ampèresur les îles Kerguelen, permet d'appréhender les impacts du changement climatique sur les glaciers. ©Vincent Jomelli/LGP/CNRS
L'évaluation de la quantité de neige accumulée sur le glacier Ampèresur les îles Kerguelen, permet d'appréhender les impacts du changement climatique sur les glaciers. ©Vincent Jomelli/LGP/CNRS
Hors-Champs Institution Publié le 03/04/2019
1939, 2019 : le CNRS célèbre son anniversaire en affirmant haut et fort « depuis 80 ans nos connaissances bâtissent de nouveaux mondes ». Alors que les urgences auxquelles est confrontée la planète ne peuvent se passer de l’apport de la science, l’organisme de recherche qui intègre l’ensemble des disciplines scientifiques sait que c’est dans la pluridisciplinarité que les défis peuvent être relevés. La question des moyens alloués à la recherche est au centre de ces enjeux.

« J'ai demandé à Frédérique Vidal* de mettre en chantier l'élaboration d'une loi de programmation pluriannuelle pour la recherche. Nous devons nous donner des perspectives. L'objectif de cette loi, c'est d'engager dans la durée les transformations dont notre recherche a besoin, et de vous donner, à vous, du temps, des moyens et de la visibilité. » On ne peut pas dire que ces propos du premier ministre soient tombés dans des oreilles de sourds. Le 1er février dernier, Edouard Philippe s’adressait à près d’un millier de directrices et directeurs des laboratoires et de partenaires du CNRS, réunis à la Maison de la mutualité pour une convention marquant le lancement du 80ème anniversaire du Centre national de la recherche scientifique.

Les objectifs de la stratégie Europe 2020. Le financement de la recherche est l’objet de bien des préoccupations depuis des années. Le projet de loi d’orientation et de programmation de la recherche et de l’innovation adopté en 2006 avait suscité la mobilisation d’une partie de la communauté scientifique à travers le mouvement Sauvons la recherche. A l’époque, ce collectif réclamait une hausse du budget de la recherche à hauteur de 3% du PIB. « Aujourd’hui nous en sommes à 0,8% pour la recherche publique et à 1,45% pour les partenariats public-privé » remarque Patrick Monfor, secrétaire général du syndicat national des chercheurs scientifiques (SNCS-FSU). Assez loin donc de ce fameux objectif de 3% repris en 2009 dans la Stratégie Europe 2020 du traité de Lisbonne.

Six organismes de recherche européens. En octobre dernier, les présidents de six organismes de recherche européens ** posaient aussi la question des financements dans un appel commun, Le savoir, moteur de l’Europe. Ils estimaient notamment qu’ « augmenter les budgets consacrés à la recherche est le seul moyen de maintenir notre positionnement vis-à-vis de nos concurrents – asiatiques en particulier – qui de leur côté accroissent massivement les financements alloués à la science, mais aussi d’améliorer notre position au sein de la concurrence internationale et de préserver notre suprématie scientifique et industrielle ». C’est donc dans ce contexte que survient l’annonce du premier ministre. Mais si elle est accueillie favorablement, les principaux intéressés en attendent des décisions tangibles. « Ce qui sera important aussi, ce sont les moyens qui lui seront alloués. Il n’y a pas de miracle, une loi de programmation pluriannuelle sans moyens n’aurait qu’un faible intérêt », commente Antoine Petit, Président directeur général du CNRS.

Depuis 80 ans nos connaissances bâtissent de nouveaux mondes. En cette année anniversaire, le CNRS attend beaucoup de cette loi, ne serait-ce que pour ne pas faire mentir la devise présidant aux nombreuses manifestations et célébrations organisées tout au long de l’année : « Depuis 80 ans nos connaissances bâtissent de nouveaux mondes ». Une devise par laquelle le PDG a voulu signifier que « la science nous fait avancer dans tous les domaines » et, qu’elle accompagne toutes les grandes mutations de la société. Un rapide coup d’œil dans le rétroviseur permet de s’en convaincre. Au sortir de la guerre, c’est la création du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) qui va permettre le développement du modèle énergétique dominant du pays, quoiqu’on puisse penser par ailleurs du nucléaire. Ce sera aussi la création de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) qui depuis accompagne toutes les évolutions de l’agriculture. Au début des années 1960 viendra le tour du Centre national d’étude spatiale (CNES), moteur de la conquête de l'espace, puis de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

A l’origine du web il y a 30 ans. Autre exemple, le domaine du numérique : l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria), dédié à une informatique encore balbutiante à l’époque et dont on sait l’importance qu’elle a prise depuis, a vu le jour en 1967. Et, si aujourd’hui le numérique rime avec GAFAM, sait-on que c’est grâce à des ingénieurs du CNRS de Lyon que le web a vu le jour il y a tout juste 30 ans ? A chaque époque, à chaque progression des connaissances, à chaque besoin émergent de la société, son lot de créations de laboratoires, d’organismes de recherche. On pourrait ainsi multiplier les exemples de ces domaines investis par les scientifiques du CNRS dont les travaux ont construit une culture scientifique si influente sur les modes de vie actuels.

Des réponses complexes aux questions posées par la société. 80 ans après sa création, le CNRS est devenu un des leaders mondiaux de la recherche scientifique. Il compte près de 32 000 chercheurs, ingénieurs et techniciens et, ajoute Antoine Petit, « si on prend en compte l’ensemble des personnels de nos partenaires, les permanents et les non-permanents, les doctorants, etc., nos laboratoires accueillent près de 120 000 personnes. ». Avec 950 laboratoires, 133 unités de recherche, pas une discipline scientifique qui n’échappe à cette organisation tentaculaire. « Les questions posées par la société sont rarement disciplinaires », poursuit-il, « il faut être capable d’apporter des réponses pluridisciplinaires ». Les défis et les urgences auxquels est confrontée la planète ne peuvent se passer de réponses complexes, à l’instar de la lutte contre le réchauffement climatique. Qui pourrait ignorer que pour limiter la hausse des températures il faudra mettre en œuvre des connaissances relevant des sciences dures (physique, chimie, climatologie…), relevant de la technique et des processus industriels, relavant des sciences économiques et des sciences humaines et ainsi bâtir un nouveau monde, celui de l’après transition écologique ?

 

* Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.

** Consiglio nazionale delle Ricerche (Italie), Conseil national de la recherche scientifique (France), Consejo superior des investigaciones cientifica (Espagne), Helmholtz-Gemeinschaft Deutscher Forschungszentren (Allemagne), Leibniz-Gemeinschaft (Allemagne), la Société Max-Planck (Allemagne).

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