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Les séries, passion du siècle

par Élisabeth Pan
Corrine Masiero, Capitaine Marleau de la série télévisée française éponyme créée par Elsa Marpeau et réalisée par Josée Dayan. © France 3
Corrine Masiero, Capitaine Marleau de la série télévisée française éponyme créée par Elsa Marpeau et réalisée par Josée Dayan. © France 3
Publié le 05/02/2020
Le 24 mars prochain, le monde des séries va être bouleversé. Disney va proposer une nouvelle plateforme qui met à mal la suprématie de Netflix. En peu d’années, les séries sont devenues un incontournable de la vie sociale.

Les séries sont aujourd’hui partie intégrante de notre vie. Elles sont sur nos écrans, au centre de nos conversations… D’où vient cet engouement ? Le chiffre d’affaires du secteur n’y est pas pour rien, ni le changement des modes de vie, ni la multiplication des offres… Certes, mais avant tout les séries montrent la vie de tous les jours. Elles peuvent même évoluer sur plusieurs années en suivant une génération. Et le désir de savoir ce qu’il va se passer dans l’épisode suivant nous dévore.

Sur l’écran du téléphone en prenant le bus, en buvant un café avec les collègues de travail, entre amis en soirée, en famille devant la télé, il n’y a ni heure, ni lieu particulier pour regarder ou parler des séries. Mais leur force principale tient en leur capacité à si bien représenter notre société, à traiter sans tabou des questions qu’elles se posent, fussent-elles très intimes, quel que soit notre âge. Et même quelle que soit notre condition sociale, « y compris membres des catégories diplômées et supérieures, contrastant ainsi avec le statut de la série il y a trente ans » comme le note le laboratoire Pacte de sciences sociales du CNRS et de l’université de Grenoble.

 

Un engouement toujours plus vif. S’il a gagné en puissance, cet investissement social et culturel pour les séries n’est pas nouveau. Le premier feuilleton sorti à la télévision française, L’agence Nostradamus en 1950, est une série policière. La force du polar est de capter l’attention du spectateur du début à la fin. Ce genre est aujourd’hui encore le préféré des Français, comme le montre la série Capitaine Marleau qui captive 7 millions de téléspectateurs depuis 2014. Sa recette est simple : une enquêtrice déjantée, un milieu social et géographique toujours différent, une star du cinéma à chaque épisode, Depardieu, Balibar, Arditi, Adjani…

Les séries peuvent ouvrir les yeux sur les sujets difficiles à aborder, comme Pause café qui fut en 1981 la première série sur les banlieues. On y retrouve Véronique Jannot qui n’a quasiment pas eu le choix de continuer la série tant elle a été appréciée. Les séries ont aussi joué un rôle majeur dans l’évolution du statut de la femme en France, comme Les saintes chéries qui suivit la loi de 1965 sur l’émancipation de la femme et en montra les conséquences dans les foyers. Le plus impressionnant dans les séries est leur tenue, leur longueur, notamment les séries quotidiennes telle que Plus belle la vie, qui a rassemblé une des plus fortes audiences en France pendant plus de 1700 heures.

 

Un attachement fort aux personnages. On voit dans les séries des situations de la vie de tous les jours. Le jeune Fabre de Cécile Aubry, en 1973, avait permis aux jeunes qui vivaient leurs premières amours de s’identifier aux personnages, aux situations et de rêver. La télévision française atteint le sommet de l’identification avec Fais pas ci, fais pas ça, série sortie en 2007 et terminée en 2017, dans laquelle les enfants grandissent sous nos yeux. On s’attache à eux et on les voit évoluer jusqu’à ce qu’ils deviennent eux-mêmes parents. C’est également le cas de Yolande, la fille de Navarro, que l’actrice Emmanuelle Boidron a interprété de ses 11 à ses 28 ans.

Cette évolution des personnages, les Américains la traitent surtout en sitcoms (épisode de vingt minutes en unité de lieu), comme Friends ou How I met your mother. L’attachement ainsi créé au personnage peut aller loin, comme dans Une femme d’honneur. L’actrice principale Corinne Touzet en sait quelque chose, qui a déçu son public en faisant mourir son personnage pour quitter la série. Un long métrage n’a pas la capacité de créer une telle fidélité au personnage.

 

Un format différent du cinéma. Contrairement aux séries, le temps d’un film ne permet pas l’évolution détaillée de l’intrigue et des personnages. Les films représentent eux aussi la société et la vie de tous les jours, mais sur un format qui les empêchent de se concentrer sur plus d’une facette. Il existe cependant des sagas, des séries de films, qui font évoluer l’intrigue et les personnages. Harry Potter a par exemple su capter l’attention d’une génération entière sur huit films en dix ans, passant de l'enfant à l'adulte.

Une situation sociale peut-elle encore échapper aux séries ? En une année, plus de 500 séries sortent aux États-Unis. L’Europe s’y met avec entrain. Un succès confirmé par les réseaux sociaux où se créent des fan-base (groupe de fans) pour partager l’émoi et théoriser sur le prochain épisode, preuve que les séries influencent notre quotidien. Toute une génération grandit avec elles. Autant que les séries grandissent avec nous.

 

Qui dit série, dit piratage. Selon une étude de l’institut britannique MUSO, le premier épisode de la huitième et dernière saison de la série Games of Thrones aurait été téléchargé illégalement plus de 55 millions de fois moins de 24h après sa sortie, explosant les records. Les épisodes de séries populaires sont mis en ligne immédiatement, avec des sous-titres et partout dans le monde à peine quelques heures après sa sortie. Les Français y voient un moyen de trouver plus facilement le contenu de séries américaines, et d’échanger dès le jour de leur sortie sans risquer de se faire spoiler (d’apprendre ce qu’il s’est passé avant d’avoir pu visionner l’épisode) sur les réseaux sociaux. Ce piratage est bien entendu interdit, même à usage personnel, il est régi par la loi Hadopi du juin 2009.

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