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Antoine Petit : « le CNRS a accompagné les grandes mutations de la société et continuera de le faire »

par Pierre Magnetto
Antoine Petit, président-directeur général du CNRS. © Frééerique Plas/CNRS
Antoine Petit, président-directeur général du CNRS. © Frééerique Plas/CNRS
Hors-Champs Institution Publié le 01/04/2019
Depuis 80 ans le CNRS éclaire et accompagne les grandes mutations de la société dans tous les domaines, ou presque. L’organisme de recherche est aujourd’hui en première ligne sur des questions aussi essentielles que le réchauffement climatique ou le développement de l’intelligence artificielle, en première ligne sur tout ce qui façonne le monde de demain. Rencontre avec son Président directeur général Antoine Petit.

« Depuis 80 ans nos connaissances bâtissent de nouveaux mondes », c’est la devise avec laquelle vous célébrez le 80ème anniversaire du CNRS. Qu’avez-vous voulu signifier ?

Nous avons voulu signifier que la science est présente dans toutes les activités humaines, qu’elle nous fait avancer dans tous les domaines, qu’elle est fondamentalement un facteur de progrès. Les connaissances produites par le CNRS ne restent pas accumulées dans un tonneau sans fond, sans intérêt et sans impact, bien au contraire, elles ont une implication dans la construction non pas d’un nouveau monde, mais de nouveaux mondes, au pluriel. Depuis sa création, le CNRS a accompagné les grandes mutations de la société et continuera de le faire. La science a formidablement transformé nos vies. Les attentes qu’elle suscite restent immenses, le CNRS en est conscient.

 

Le CNRS a investi toutes les disciplines scientifiques avec un effectif de 33 000 personnes. Qu’est-ce qui donne de la cohérence à l’ensemble ?

En réalité, si on prend en compte l’ensemble des personnels de nos partenaires, les permanents et les non-permanents, les doctorants, etc., nos 1000 laboratoires accueillent près de 120 000 personnes. Ce qui fait la force du CNRS c’est précisément d’avoir en son sein l’ensemble des disciplines. Quand par exemple on s’intéresse à des questions sociales ou industrielles, il faut être capable d’apporter des réponses pluridisciplinaires. Les questions posées par la société civile ne sont pas des questions disciplinaires, pas des questions de maths, de physique, de chimie ou même de sociologie. Prenons des exemples aussi variés que l’intelligence artificielle, le changement climatique, la radicalisation ou les gilets jaunes – je ne sais pas si c’est un problème mais c’est en tout cas un sujet – si la science veut apporter des éléments de réponse pertinents, intéressants, il faut qu’elle soit en mesure de faire collaborer des chercheurs venant des sciences dures comme les maths, l’informatique, la physique la chimie, avec des chercheurs en sciences humaines et sociales. Avoir en son sein l’ensemble des spécialistes, être capable de les faire coopérer, c’est justement ce qui fait la force du CNRS aujourd’hui. Bien entendu, les recherches pluridisciplinaires doivent s’appuyer sur des recherches disciplinaires de qualité. Ce n’est pas toujours simple d’avoir à la fois les meilleurs spécialistes dans tous les domaines scientifiques et de faire en sorte qu’ils travaillent ensemble à produire des connaissances pluridisciplinaires.

 

Vous avez déclaré le 1er février lors du lancement du 80ème anniversaire, « la France est un grand pays scientifique, elle doit mieux en profiter », qu’est-ce qui doit être amélioré selon vous ?

Il me semble important d’améliorer les interfaces entre la science et le reste de la société. De développer les interactions non pas entre la science et la société, dit comme ça ça laisserait penser que la science ne fait pas partie de la société, mais entre les scientifiques et les industriels, entre les scientifiques et les décideurs publics, entre les scientifiques et les collectivités, entre les scientifiques et le grand public et, de manière générale, entre les scientifiques et l’ensemble des acteurs de la société civile. Notre stratégie aujourd’hui est de développer les partenariats avec tous ces acteurs, pour définir des modalités de collaboration adaptées aux enjeux scientifiques, pour jouer un rôle fédérateur au bon fonctionnement et au rayonnement de la recherche française. Cette approche partenariale est structurante en matière de politique scientifique, d’innovation, de formation et d’organisation.

 

Le premier ministre a annoncé une prochaine loi de programmation pluriannuelle pour la recherche. Êtes-vous satisfait de cette annonce et qu’en attendez-vous de concret ?

Avoir une loi pluriannuelle est quelque chose d’extrêmement positif, je crois que l’ensemble de la communauté scientifique est intéressé par cette opportunité. Maintenant il va falloir que ce soit une grande loi et au CNRS nous nous mobilisons pour cela. Nous avons écrit à tous les directrices et directeurs d’unités de recherche pour leur demander de nous faire remonter leurs propositions. Il est extrêmement important que l’ensemble de la communauté scientifique entre dans une démarche de co-construction, pour que cette loi intègre les éléments essentiels aux yeux des scientifiques. Ce qui sera important aussi, ce sont les moyens qui lui seront alloués. Il n’y a pas de miracle, une loi de programmation pluriannuelle sans moyens n’aurait qu’un faible intérêt.

 

Quels sont les grands défis auxquels doit faire face le CNRS aujourd’hui ?

C’est d’abord de répondre à nos priorités : maintenir notre recherche fondamentale au meilleur niveau à l’échelle mondiale, développer plus d’interactions avec le monde socio-économique, être capable de traiter les questions de façon pluridisciplinaire, développer nos partenariats en France avec les universités et les écoles, et à l’international avec nos homologues. Le CNRS est un centre de recherche très internationalisé. Nous recrutons chaque année plus de 30% de chercheuses et de chercheurs hors de France, nous avons 200 laboratoires implantés hors du territoire français, nous contribuons au rayonnement de la France. Le grand challenge pour le CNRS aujourd’hui c’est d’être un ambassadeur de la science française à travers le monde, de rappeler que cette science est d’une part de très grande qualité, mais qu’une loi de programmation pluriannuelle sera indispensable pour maintenir cette qualité. Notre grand défi, c’est toujours de produire des connaissances qui vont bâtir des nouveaux mondes comme nous le faisons depuis 80 ans.

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