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Avignon off : Désertion (Jour 0), théâtre d’un « 21ème siècle apocalyptique »

par Clémence Bohême
Sur scène, Julien Allouf joue un personnage névrosé par la violence de Tel-Aviv en déshérence amoureuse. DR
Sur scène, Julien Allouf joue un personnage névrosé par la violence de Tel-Aviv en déshérence amoureuse. DR
La pièce est composée de deux textes, l'un récité par Julien Allouf sur une scène, l'autre par Clément Bondu accompagné de ses musiciens. DR
La pièce est composée de deux textes, l'un récité par Julien Allouf sur une scène, l'autre par Clément Bondu accompagné de ses musiciens. DR
Hors-Champs Croisement Publié le 16/07/2015
Dans le Off d’Avignon, au Grenier à sel, se joue Désertion (Jour 0), une forme hybride à mi-chemin entre le concert et le théâtre. Voyage de Tel-Aviv à Ramallah à travers la violence des émotions éprouvées par les deux concepteurs, Julien Allouf et Clément Bondu, lors d’un séjour commun.

Désertion (Jour 0) ce sont deux textes, deux concepteurs, deux acteurs. Mais ce sont surtout deux témoins de ce qu’ils appellent cette "troisième guerre mondiale pour 21ème siècle apocalyptique" qui règne entre Israël et la Palestine. Désertion (Jour 0) se fait le théâtre de la violence en cours entre Tel-Aviv et Ramallah. Une violence intériorisée dans le monologue d’un personnage incarné par Julien Allouf, un oratorio brutal dans les chants de Clément Bondu accompagné de ses musiciens. Deux humains fragilisés par l’état de guerre permanent qui règne dans ce pays. De leur voyage commun dans ces villes en 2012, est né un besoin de "faire état de ce monde" sur scène, et d’y insuffler un peu d’espoir.

Une forme hybride. Dans un hôtel plus que modeste de Ramallah, les compagnons de route ont eu envie "d'écrire sur la situation politique et sur ce que cela nous paraissait révéler du monde", explique le poète et musicien Clément Bondu. Chacun dans leur registre, les auteurs ont voulu confronter leur expérience. Deux textes et deux personnages fictifs ont suivi ce séjour. "Désertion" d’un côté, un texte qui tient de l’autobiographie ou du journal, écrit par Julien Allouf, et "Jour 0" de l’autre, un poème de Clément Bondu qui emprunte à la musique son rythme. Ils les présentent aujourd'hui sur scène à Avignon dans une "forme hybride", entre le concert, le théâtre, le voyage de l'un et celui de l'autre, sur deux scènes parallèles.

Entre brutalité et espoir. Ce qui frappe d’abord, c’est la brutalité des mots, aussi intenses que le ressenti des deux voyageurs. Dans ces deux textes, pas de géopolitique, pas de religieux, pas de cadres langagiers, ni de bienveillance envers le spectateur. Le contexte est posé. "Six millions de morts pour neuf cent mille réfugiés". Très vite, le Grenier à sel où se joue le spectacle prend une odeur de lendemain de soirée. Le personnage de Julien Allouf va de névrose en névrose : alcool, cigarette, fumée, repli sur soi, et surtout "déshérence amoureuse". Sur une deuxième scène, la genèse de la non-création du monde par un dieu impuissant se joue en musique avec Jean-Baptiste Cognet, François Morel et David Perron et Clément Bondu au chant. Et au jour du dernier jour, c’est DieuE au féminin qui est advenue, inspirée des lectures de la philosophe américaine Judith Butler et de l’écrivain suédois Stig Dagerman, forte et courageuse, prête à sortir de sa chambre d’hôtel miteuse.

Entre jeu d’acteur et jeu de scène. Les metteurs en scène jonglent entre le monologue, l’introspection, l’oratorio poétique, également entre le théâtre et le concert. La pièce puise sa cadence dans une multiplicité de formats. La musique dessine les sentiments des personnages avec certains sons sortis de l’inconscient, à la télévision des images mortes des actualités défilent comme pour poser le contexte, sur un écran d’ordinateur projeté, le personnage de Julien Allouf parle à sa conscience et, sur l’estrade, les gestes de Clément Bondu sont presque chorégraphiés. Une mise en scène pleine de contrastes où les formes se mêlent. Leur théâtre est rempli à la fois de liberté, de technicité et d’émotions singulières.

 

Avignon Off : tous les jours jusqu'au 25 juillet à 12 heures au Grenier à Sel, 2 rue des Remparts. Relâche le 20 juillet.

 

BIO:

Julien Allouf : Après une formation au Studio Théâtre d'Asnières et au CNSAD, il travaillera notamment sous la direction de J. Osinski pour Le triomphe de l'Amour de Marivaux créé à la MC2 de Grenoble et de L. Lagarde pour la création de l'Intégrale Büchner à la Comédie de Reims. Parallèlement, il monte la compagnie L'impossible avec Clément Bondu "dans un souci commun de renouveler les formes d'écritures théâtrales." A la suite d'un voyage de trois mois au Mexique, où il est parti sur les traces du roman Les détectives sauvages de Roberto Bolano, il travaille actuellement sur une exposition photographique "DISTRITO FEDERAL, fin del mundo" avec la photographe Azahara Gomez-Lucini. Celle-ci mêlera écriture, performance, projections vidéos et musique.

 

Clément Bondu: écrivain, poète, chanteur, metteur en scène et musicien né en 1988. Après avoir suivi une formation littéraire et théâtrale dans plusieurs écoles, Clément Bondu choisit de se consacrer essentiellement à l'écriture. Avec les collectifs La Meute et L'Impossible, il travaille sur le théâtre. Mais c'est grâce à la musique et Mémorial* qu'il développera son identité, son oratorio poétique, avec Jean-Baptiste Cognet. Ensemble, ils travaillent actuellement sur une longue fresque poétique d'une dizaine d'heure : Nous qui avions perdu le monde.

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Désertion (Jour 0), Clément Bondu et Julien Allouf, festival d'Avignon, Grenier à sel,
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