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Avignon OFF : « Un obus dans le cœur », l’histoire contée

par Julie Delem
"Un Obus dans le coeur"de Wajdi Mouawad. Mise en scène : Catherine Cohen. Avec Grégori Baquet. ©iFou
"Un Obus dans le coeur"de Wajdi Mouawad. Mise en scène : Catherine Cohen. Avec Grégori Baquet. ©iFou
 Grégori Baquet a reçu le Molière 2014 de la révélation masculine pour l'interprétation de Wahad dans
Grégori Baquet a reçu le Molière 2014 de la révélation masculine pour l'interprétation de Wahad dans "Un Obus dans le coeur". DR.
Arts vivants Théâtre Publié le 16/07/2015
Wahad est hanté par une hallucination de son enfance, qu'il projette sur sa mère. Avec Un obus dans le cœur, Catherine Cohen propose une mise en scène minimaliste du texte de Wajdi Mouawad laissant toute la place à l'imaginaire.

Wahad vient de recevoir un appel de son frère. Sa mère est sur le point de mourir. Wahad a une trentaine d'année, vit au Québec, mais a grandi au Liban, avant de fuir la guerre pour la France. Son chemin vers l'hôpital est l'occasion d'une grande introspection sur ses terreurs d'enfant, sa joie perdue et son amour maternel refoulé. Wajdi Mouawad, auteur franco-canadien, a extrait le monologue Un obus dans le coeur de son roman Visage Retrouvé (2002). Le texte, riche en images, se suffit pratiquement à lui même : il nous emmène sous les cèdres, dans les flammes d'un attentat, sous une tempête de neige, nous ballotte entre les souvenirs et les réflexions intimes du personnage.

Distanciation. Face à ce « voyage » mêlant « le réalisme et le poétique, le naturalisme et le merveilleux », Catherine Cohen prend le parti de ne pas en rajouter. Mieux, la metteuse en scène opte pour la distanciation. Un obus dans le cœur adopte en quelque sorte le point de vue de son personnage : Wahad est en retrait du milieu qui l'entoure, il observe sa vie comme on jette un coup d'oeil à un mauvais film. De la même manière, Grégori Baquet récite son texte seul, dans un univers blanc. Il a beau planter son regard dans le nôtre, il reste un personnage froid, on ne le comprend pas, il n'est personne. Trop propre, trop lisse, ses émotions ne nous traversent pas, nous observons seulement son malaise. Cette mâchoire carrée, ce phrasé profond mais sans chaleur. Mais qui a le goût d'une colère ramassée, se changeant bientôt en dégoût latent. Grégori Baquet fait de Wahad une sorte de militaire qui rase les murs, se cachant parfois sous une capuche, conscient peut-être de sa dangerosité. Sauf quand il est face à ses peurs, de gamin, de fou, d'une sensibilité qui échappe au commun des mortels. La scène prend alors la couleur de l'effroi, de l'ombre de la guerre et de la cruauté. Grégori Baquet a reçu le molière 2014 de la révélation masculine pour cette interprétation.

 

Un obus dans le coeur, du 3 juin 2015 au 23 juin 2015 au théâtre du Balcon, Avignon. Texte : Wajdi Mouawad. Mise en scène : Catherine Cohen. Avec Grégori Baquet. Musique : Sylvain Jacques. Lumières : Philippe Lacombe. Décors : Huma Rosentalski. 

 

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Bio: Catherine Cohen est réalisatrice et metteuse en scène. Au théâtre, elle signe notamment Fool for Love de Sam Shépard (Espace Kiron, Paris 2002), La vedette de Jean-Christophe Barc (Le Carré Belle-Feuille, Boulogne-Billancourt 2009), Si j’étais diplomate de Alain Sachs (Le Carré Belle-Feuille, Boulogne-Billancourt 2010) et Toujours ensemble d'Anca Visdéi (Théâtre de l’Opprimé, Paris 2011).

 

Extrait « On ne sait jamais comment une histoire commence. Je veux dire que lorsqu’une histoire commence et que cette histoire vous arrive à vous, vous ne savez pas, au moment où elle commence, qu’elle commence. Je veux dire... Je veux dire que vous n’êtes pas là, à marcher tranquillement dans la rue et tout à coup, vous vous dites : tiens, voilà, une histoire qui commence. Je veux dire, on ne le sait pas... puis, lorsque finalement on réalise qu’on est embarqué dans une histoire, on ne sait pas comment tout ça va se terminer. Personne ne peut savoir. C’est seulement à la fin. Lorsque tout est consommé, qu’on ouvre les yeux et qu’on se dit : l’histoire est terminée. Elle est terminée et parce qu’elle est terminée, vous vous mettez à entendre le silence, le grand silence qui a failli vous noyer. C’est comme ça. Alors, pour conjurer le silence, on tente de trouver les mots. Pour raconter. Même si c’est n’importe quoi, mais un mot qu’on trouve au fond de soi, c’est comme une oasis au milieu du désert. On se précipite dessus et on le boit. On boit le mot. »

 

 

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