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Florence Caillon : « J’ai mélangé ma plume à celle de Tchaïkovski »

par Véronique Giraud
La circassienne et musicienne Florence Caillon dans son studio d'enregistrement. DR
La circassienne et musicienne Florence Caillon dans son studio d'enregistrement. DR
Arts vivants Interdisciplinaire Publié le 19/03/2021
À la danse et à la musique du "Lac des cygnes" de Tchaikovski, Florence Caillon a ajouté le cirque, sa musique, et une nouvelle narration. Et tout change de notre regard, de notre écoute, de notre perception même du cirque. Entretien.

La manière dont vous abordez les corps, en mêlant les sexes, est très touchante. Femmes et hommes portent un tutu classique, et ont enfilé un collant de dentelles fines qui souligne délicatement leur torse et leurs cuisses…

Dans quasi tous mes spectacles j’ai habillé les hommes en femmes. Je leur donne des éléments féminins et des éléments masculins aux femmes. Au-delà de l’identité genrée, chaque être a en lui des éléments féminins et des éléments masculins. À nous de les cultiver. Tout le monde a à gagner à cette liberté. Dans le ballet d’opéra, c’est très stéréotypé.

J’ai déplacé énormément la question de l’amour. Pour moi, elle doit s’ouvrir, un homme une femme, deux hommes ensemble, deux femmes. Ça peut être aussi l’amour fraternel, l’amour enfantin, l’amour rêvé. J’avais envie de parler de toutes ces formes d’amour. La solitude fait aussi partie de l’amour, c’est important pour moi. Notre société survalorise le couple. Or des tas de gens vivent seuls et ne s’en portent pas plus mal, ont une vie très riche. J’avais envie aussi de les faire sortir de cette représentation du noir et du blanc. Le noir mauvais, le blanc gentil et pur, cela me déplaît. J’aurais pu mettre tous les cygnes en gris, une couleur que j’aime parce qu’il est neutre. Je les ai gardés en noir et blanc, mais je les ai fait appartenir à une même espèce, c’est-à-dire qu’ils ont le même costume, pas tout à fait le même, chacun est différent grâce au magnifique travail de dentelle de la costumière Emmanuelle Huet.

 

Les spectateurs vont voir Le lac des cygnes, qu’est-ce qu’ils entendent ?

Ils entendent certains des thèmes de Tchaïkovski. J’ai voulu une récurrence du thème principal, mais j’ai choisi certains thèmes qui correspondaient à ce que j’avais envie de raconter. Le ballet est très long, un spectacle de cirque dure généralement une heure. Ce qui m’intéressait c’était de plonger dans un thème, de tirer un fil et de tricoter autre chose. J’avais envie qu’on entende les thèmes du Lac des Cygnes, et que le spectateur les reconnaisse. Au niveau de l’orchestration originale, il y a des choses qui ne correspondent pas à ce que j’aime faire, à ma musique. J’ai donc demandé l’autorisation à Tchaïkovski, je suis partie de certains thèmes de son œuvre, je les ai parfois continués, parfois j’ai utilisé un contre-point. J’ai mélangé ma plume à celle de Tchaïkovski, ça a été un grand honneur, une grande joie.

J’ai fait des aller et retour entre musique et chorégraphie. J’avais d’un côté ma recherche autour du cirque chorégraphié que je mène depuis vingt ans, de l’autre ma pâte musicale avec laquelle je me sentais de réécrire une partition à partir de Tchaïkovski. J’ai frotté les matières régulièrement. Le début est arrivé tout de suite, je voulais cette nappe, ce lac où on est dans l’univers des cygnes. On est chez eux.

 

Comment vient cette création dans votre parcours ? Est-ce quelque chose que vous ne vous étiez pas autorisé auparavant ?

Je n’avais jamais monté une pièce de répertoire. Et j’avais envie de faire entendre ma musique, de ne pas recourir à une collaboration comme il m’arrivait de le faire.

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