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Global Award for Sustainable Architecture : éthique et sobriété

par Véronique Giraud
Le 11 mai 2017, dans l'auditorium de la Cité de l'architecture et du Patrimoine, le 11ème Global Award for sustainable architecture, fondé par Jana Revedin, a récompensé cinq architectes. ©Giraud/NAJA
Le 11 mai 2017, dans l'auditorium de la Cité de l'architecture et du Patrimoine, le 11ème Global Award for sustainable architecture, fondé par Jana Revedin, a récompensé cinq architectes. ©Giraud/NAJA
Ice Stupa, Sonam Wangchuk, Global Award for sustainable architecture. DR
Ice Stupa, Sonam Wangchuk, Global Award for sustainable architecture. DR
Paolo David, Centre artistique
Paolo David, Centre artistique "Casa das Mudas", Madère, Portugal 2001-2004 © Fernando Guerra & Sérgio Guerra
Style de vie Architecture Publié le 15/05/2017
Le 11 mai, à la Cité de l'architecture et du Patrimoine, le 11ème Global Award for sustainable architecture a récompensé cinq professionnels dont les pratiques éthiques et innovantes contribuent à une nécessaire redéfinition du métier d'architecte.

Créé par l'architecte allemande Jana Revedin, le Global Award for sustainable architecture est accueilli chaque année dans le bel auditorium de la Cité de l'Architecture et du Patrimoine à Paris. Le 11 mai dernier, le directeur de la Cité, Guy Ansallem, expliquait que ce prix récompense des architectes "convaincus qu'il faut mettre fin à une folie moderniste, et réconcilier ce qui a été séparé". De son côté, Jana Revedin rappelait que : "c'est au Palais de Chaillot, dans lequel la Cité de l'architecture a été installée, qu'ont été signés les états généraux des Droits de l'Homme" et cite une écrivaine italienne : "Tout ce qui reste de nous, c'est ce qu'on a transmis". À travers leurs projets, tous porteurs d’enjeux de société, et leurs démarches audacieuses pour les mener à bien, les architectes primés par le Global Award for Sustainable Architecture offrent une vision inédite du métier d'architecte. Et généreuse.

Leur présentation est une surprise : on comprend que ces projets ne sont pas nés pour flatter les nantis mais pour retendre le lien avec des populations et des paysages peu représentés. Des populations qui subissent de plein fouet la hausse des loyers, qui se désespèrent de voir leur littoral dénaturé par l’emprise du tourisme et son économie autoritaire, dont l’existence serait facilitée par l’utilisation de matériaux naturels de proximité, en lieu et place de ceux fabriqués par une technologie coûteuse. Ces histoires passionnantes font voyager dans le monde entier, et démontrent que l'architecture durable va bien au delà d'un programme d'éco-construction, nécessite un engagement à toute épreuve, et un temps dévolu à la transmission d'un savoir pragmatique.

 

Un ingénieur pour le Ladakh. Pour la première fois depuis sa création, le Global Award for Sustainable Architecture récompense un ingénieur. Comme celle des architectes, son expérience est forte et pleine d’enseignement. La portée de ses projets est vaste, elle rejoint l’avenir de tout un peuple, le sien, celui du Ladakh, situé au nord de l’Inde. Sonam Wangchuk est venu à la Cité de l’Architecture conter 25 ans de sa vie, un quart de siècle passé à rendre les montagnes arides de son pays grand comme la France, moins hostiles à la modernité. Son expérience de développement d’un mode d’écoconstruction durable, accessible à tous, l’a conduit à s’intéresser à l’éducation des nouvelles générations du Ladakh, et à créer une école alternative. Conscient également de la menace des ressources en eau dans cette région d’Himalaya, l’ingénieur est a conçu des réservoirs très originaux, qu’il a convaincu la population d’adopter.

Pour le couple japonais, Takaharu et Yui Tezuka, l’aventure est familiale et joyeuse. Leur première expérience sort bien sûr des sentiers battus tokyoïtes et nous mène sur le toit d’une maison, sur lequel les habitants savourent désormais la beauté des jours et de certaines nuits, face à l’infini du paysage. Takaharu et Yui Tezuka sont aussi à l’origine d’un jardin d’enfants inédit, inspiré de leurs propres sensations, de l’observation de leurs deux enfants, et de leurs propres convictions confrontées aux savoirs de scientifiques.

 

Des architectes de combat. Le Global Award réunit la plupart du temps des architectes de combat. Tous les projets évoqués ont nécessité de convaincre les habitants, et les élus récalcitrants. Qu’il s’agisse de préserver une nature qu’ils aiment intimement, qu’ils comprennent profondément, comme c’est le cas pour l’architecte portugais Paulo David ou le duo canadien Bryan Mackay & Talbot Sweeteapple. Lorsque Paulo David évoque la beauté de son île de Madère, il donne envie de prendre le premier vol de la destination. Dessinant des volumes qui épousent la profondeur ou le relief du rocher volcanique, utilisant les matériaux dont il est constitué, l’architecte exprime qu’il est possible de faire autre chose qu’une côte bétonnée pour accueillir les touristes. Il dit d’ailleurs préférer la notion de voyageur à celle de touriste. « On nous donne l’impression que nous ne pouvons pas voyager sans être un touriste. Madère est une terre d’accueil, pas une terre de touristes », affirme-t-il.

Pour les deux architectes canadiens, les paysages de Nouvelle Écosse, où ils sont nés et auxquels ils restent très attachés, leur ont inspiré une architecture minimaliste, qui joue la continuité avec la tradition. Simplicité et sobriété sont les maîtres mot de leur esthétique. « J’ai toujours eu l’impression que toutes les cultures découlent du pauvre » dit Bryan Mackay, qui a fait de la ferme familiale un lieu de transmission et d’expérimentation. Y sont accueillis et formés des architectes du monde entier. Dans leur nouvel ouvrage, intitulé Economy and architect, ils développent les aspects qui fondent leur pratique : éthique, écologie, esthétique. Cette dernière, Bryan la résume sobrement à « la quête du sublime à travers la simplicité ».

Les plus jeunes architectes primés sont anglais, et forment le collectif Assemble. Deux d’entre eux ont fait le voyage jusqu’à Paris pour recevoir le Global Award. Ce collectif, créé à Londres en 2010, est né de l’ennui de quelques-uns dans leurs études en architecture et de l’envie de tous de concevoir des choses nouvelles et contribuer à faire évoluer le métier d’architecte en lui donnant une dimension plus sociale et collective. En effet, les expériences menées par Assemble sont d’une grande singularité et obéissent à un seul impératif : nourrir sans cesse leur pratique en la stimulant par des expérimentations nouvelles. Les territoires sur lesquels œuvre le collectif sont des zones délaissées, dans la ville ou en périphérie, reflétant l’abandon de populations déshéritées. Leur expérience militante n’a rien d’une conquête, mais se heurte souvent à l’incompréhension et à la méfiance. Ce sont ces chemins entre les sphères qui les passionnent. Des chemins qui en découragent plus d’un et que la plupart des élus ont abandonné depuis longtemps…

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