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Guéorgui Gospodinov : du Naturel à la Mélancolie

par Véronique Giraud
Livre Roman Publié le 12/04/2018
Les talents de la littérature bulgare sont peu connus en France. Manque de curiosité du lecteur ? Désintérêt des éditeurs ? Les ouvrages de Guéorgui Gospodinov, considéré comme chef de file de la nouvelle génération, sont pourtant remarquables.

Peu d’auteurs bulgares sont arrivés jusqu’à nous. Grâce aux traductions de Marie Vrinat-Nikilov, qui s'est très tôt passionnée pour cette langue et ses auteurs talentueux, la bibliothèque bulgare s'est agrandie et il serait dommage de passer à côté d'œuvres qui n'ont pas peur de tutoyer l'universel ni de tisser de leurs mots l'histoire moderne de la Bulgarie. Parmi ces auteurs, Guéorgui Gospodinov, un peu devenu chef de file de la nouvelle génération, bouleverse la scène littéraire contemporaine de ses romans au long cours. Il est déjà l'auteur le plus lu de son pays et ses romans ont surpassé la poésie, genre jusque là dominant en Bulgarie. Son premier opus, Un roman naturel, est traduit dans une vingtaine de langues.

L'écriture de Guéorgui Gospodinov est à la fois familière et lointaine. Dans son ouvrage Physique de la mélancolie (2011), il mène le lecteur dans les couloirs de la mémoire, dans laquelle "je sommes nous". Parfois il enferme celui qui le lit dans un labyrinthe obscur où respire et pense la figure mi humaine mi animale du Minotaure. Autant de stratagèmes narratifs qui maintiennent en éveil le sentiment réconfortant d’une appartenance commune, d'une mélancolie partagée, assumée. Comme un remède à la perte de mémoire. En témoigne, au fil d'une page, un étrange autoportrait : "Qui suis-je. Un homme de quarante-quatre ans, dans une cave aux épais murs de béton, autrefois abri contre les bombes. je dis que j'ai quarante-quatre ans, mais ajoutez à cela l'âge de mon grand-père, né en 1913, ajoutez aussi celui de mon père né à la fin de la Seconde Grande Guerre, de Julietta devant le cinéma…".

Le roman est traversé d’une myriade de courts récits, personnels et collectifs, de listes et de carnets retrouvés, qui convoquent avec humour et bienveillance l'enfance et le socialisme, son grand-père et Shéhérazade, au rythme palpitant de l'épopée, une épopée chaotique de la pensée. Guéorgui Gospodinov se glisse « dans divers corps et histoires avec l’aisance de celui qui entre chez lui », entremêle les générations, le je et le nous, le court et le long, l'imaginaire et le factuel. Il parvient à donner vie à son écriture même, qui devient physique à force d'être mise à l'épreuve. Fait jaillir une impulsivité qui se rit des postures, et porte le lecteur vers une innocence salutaire.

 

 

 

Guéorgui Gospodinov est l’un des auteurs phares de la jeune génération des écrivains bulgares. La plupart de ses œuvres ont connu un immense succès en Bulgarie. Il a reçu plusieurs prix nationaux et est, à ce jour, l’écrivain bulgare contemporain le plus lu dans son pays et le plus traduit. Il est aussi l’auteur de nouvelles et d’essais, poète, dramaturge et critique littéraire. Physique de la mélancolie, son second roman, a fait partie des quatre finalistes du Prix Strega en 2014 et a reçu le Prix Jan Michalski de littérature 2016.

Ses livres sont traduits en français dans la collection Sémaphores des éditions Intervalles, issue d'une collaboration entre le Centre d’études et de Recherches sur les Littératures et Oralités du monde (CERLOM) et le Centre de Recherches Europes-Eurasie (CREE) de l’Inalco.

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ENTRETIEN AVEC LA TRADUCTRICE MARIE VRINAT-NOKOLOV
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