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« La beauté du geste », un théâtre pluriel

par Véronique Giraud
Conçue par Nathalie Garraud et Olivier Saccomano, la pièce
Conçue par Nathalie Garraud et Olivier Saccomano, la pièce "La beauté du geste" a été créée le 3 octobre au milieu du public du Théâtre des Treize Vents à Montpellier © Jean-Louis Fernandez
Arts vivants Théâtre Publié le 05/10/2019
Une pièce sur les CRS, c'est d'actualité. La pièce d'Olivier Saccomano mise en scène par Nathalie Garraud au Treize vents de Montpellier ne se résume pas à cela. "La beauté du geste" multiplient les voix et les formes pour un théâtre ouvert.

La beauté du geste d'Olivier Saccomano et Nathalie Garraud débutent la saison du CDN de Montpellier avec leur première création en tant que co-directeurs. Ils l’ont menée avec la troupe associée au Théâtre des Treize Vents. L’un a écrit la pièce, un processus qui a débuté en 2015, après les attentats de Paris. L’autre en signe la mise en scène, privilégiant un dispositif bi-frontal de gradins qui se font face, de part et d’autre du plateau. Au centre de ce qui peut s’apparenter à une rue, cinq comédiens vont et viennent, gênés par la puissance d’un mur de projecteurs qui à la fois les éblouit et les met en lumière. L’occasion de s’adresser au public pour exprimer le bonheur, mais aussi la difficulté et la complexité du métier d’acteur.

Puis chacun endosse les attributs du CRS, armes et uniformes noirs. Sans nom, ni identité, chacun devient un simple numéro. Enchaînant les exercices d’entrainements, les répétant, les accélérant au rythme d’un métronome, ces anonymes des forces de l’ordre se questionnent sur leur “ métier assez abstrait ”. Une définition finira par émerger : “ On est gardiens de la paix, pas soldats de la guerre ”. Puis, formant une ligne de front, en position d’attente, ils s’adressent au public, argumentant leurs points de vue sur le rôle de policier. Autant de divergences qui contrastent avec l’alignement parfait des hommes en noir. Le rire est présent, la leçon absente.

 

“- Où sont les prévenus?

- Là et là.

- Des deux côtés. Joli coup de filet.

Après la police, la justice. La seconde partie de la pièce déroule un procès dont les personnages, farfelus, semblent venir du public, assis des deux côtés, et du quotidien de chacun. Là encore les points de vue s’opposent, se confrontent, chacun donnant à la barre ses impressions sur ce qu'il a vu être joué dans la première partie.

En deux heures et demie, La beauté du geste aura manifesté dans un temps long les expressions d’une foule de personnages d’aujourd’hui, que la performance de cinq comédiens magnifiques relaie et rend audibles. Sans jamais friser la caricature. CRS, juges, avocats sont l’objet des réactions individuelles de tous bords. Pas toujours habiles mais sincères, les témoins appelés à la barre composent une société qui s’interroge, qui compose avec ses manques, exprime ses attentes, ses déceptions, crie ses colères et ses peurs, dit et se contredit. Jusqu’à atteindre et se confondre avec le public spectateur. Pas de protagoniste, la pièce se joue au pluriel.

 

L'acte d'écrire pour le théâtre n'est jamais anodin. Encore moins quand il est guidé par ce moment où la France s’est retrouvée en état d’urgence après les attentats. « Peut-être que ça nous mettait nous-même en état d’urgence, s’interroge Nathalie Garraud. Cela nous a poussé à nous demander ce que les artistes pouvaient produire de cet état d’urgence ». L'impulsion a conduit Olivier Saccomano et la metteure en scène à " examiner de près le rapport entre théâtre et État, à le rendre visible avec les moyens du théâtre, afin de montrer comment le théâtre peut inventer à partir de l’histoire contemporaine."

 

La beauté du geste. Conception : Olivier Saccomano et Nathalie Garraud. Texte : Olivier Saccomano. Mise en scène : Nathalie Garraud. Avec : Mitsou Doudeau, Cédric Michel, Florian Onnéin, Conchita Paz, Charlie Totterwitz. Création 2019. Du 3 au 5 octobre, du 3 au 12 octobre, du 16 au 18 octobre au Théâtre des Treize Vents CDN Montpellier. 

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