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« Les Merveilles » en pays d’Alice

par Jacques Moulins
"Les Merveilles" d’Alice Rohrwacher avec Sam Louwick, la jeune Alexandra Lungu (Gelsomina) et Alba Rohrwacher. DR
Cinéma Film Publié le 11/02/2015
Un cinéma qui mêle les esthétiques du documentaire, de la fiction et de la téléréalité. Un scénario qui s’inscrit dans les rêves échoués de soixante-huitards allemands en Italie. Et une jeune fille qui déjoue tous les codes, obtenant à Alice Rohrwacher Ours à Berlin et Grand Prix à Cannes.

Avec un titre aussi prometteur, il eut été dommage de se retrouver face à un film social comme les premières images peuvent le laisser supposer. Si Alice Rohrwacher prend bien pour fond la réalité italienne actuelle, ce n’est ni pour faire œuvre de naturalisme à la Zola, ni de militantisme à la Stephen Frears. Le décor, déjà, est à l’inverse des films sociaux. Ce ne sont pas les codes sociaux et leur distorsion qui font l’arrière plan, mais une réalité hors norme, avec un couple d’anciens contestataires radicaux, sans doute déçus par la lutte, qui se sont reconvertis dans l’écologisme. Radical lui aussi, bien entendu. Particulièrement le père. Il croit à la fin du monde bientôt détruit par les pesticides et les catastrophes climatiques et dirige une exploitation agricole, là encore hors norme, principalement vouée à l’apiculture.

Rien de bien merveilleux là-dedans, la touchante passion du père pour ses abeilles menacées étant contrebalancée par son incapacité à transiger, voire à discuter, avec sa famille et ses voisins.

Les merveilles, ce sont ses filles, dont l’aînée Gelsomina devient adolescente. Les merveilles, ce sont ces autres réalités qui vont se mêler de la vie d’ermite, et rappeler, une fois de plus, que le respect de l’autre, ne se décrète pas, ne se connaît même pas en dehors de la réalité toujours différente que lui en donne chaque individu. Gelsomina sera confrontée à cette question vitale du droit aux rêves et au respect.

Parmi les extérieurs qui percutent ce monde enfermé sur lui-même, la télévision berlusconienne va faire une entrée inattendue et percutante, aux effets merveilleux, en la personne de la très étrusque Monica Bellucci. D’autres personnages viendront encore perturber ces vacances estivales transformées en labeur clandestin pour les filles.

Alice Rohrwacher mêle les codes esthétiques, ceux du documentaire, ceux des images populaires des campagnes italiennes, ceux des films sociaux avec une réflexion sur la bi-nationalité qui vit souvent mal les deux cultures et une analyse sociale, à peine mais finement ébauchée, des années post-soixante-huit.

L’original, c’est la façon dont Gelsomina, l’aînée responsable et très aimante de son père, va se jouer de ces codes pour nous amener au pays des merveilles, pour lesquelles Alice a obtenu l’Ours de Berlin et le Grand Prix du festival de Cannes.

 

Les Merveilles d’Alice Rohrwacher avec Alexandra Lungu (Gelsomina) Sam Louwick (son père) Alba Rohrwacher (sa mère) et Monica Bellucci.

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