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Les migrants, Persona grata ?

par Véronique Giraud
« Please come back » (k font), l’œuvre du collectif Claire Fontaine fondé en 2004, acquise par le MAC VAL ©Giraud/NAJA
« Please come back » (k font), l’œuvre du collectif Claire Fontaine fondé en 2004, acquise par le MAC VAL ©Giraud/NAJA
L'artiste Kie Lei devant son œuvre
L'artiste Kie Lei devant son œuvre "Pushing", 2013. Huile sur toile. Collection MAC VAL. ©Giraud/NAJA
Mona Hatoum, Suspendu 2009-2010. Installation, MDF recouvert de stratifié rouge gravé, chaînes en acier, dimensions variables. Collection MAC VAL - Musée d’art contemporain Val-de-Marne. Acquis avec la participation du FRAM Île-de-France. ©Giraud/NAJA
Mona Hatoum, Suspendu 2009-2010. Installation, MDF recouvert de stratifié rouge gravé, chaînes en acier, dimensions variables. Collection MAC VAL - Musée d’art contemporain Val-de-Marne. Acquis avec la participation du FRAM Île-de-France. ©Giraud/NAJA
Au premier plan,
Au premier plan, "Rain Bow", installation de Mircea Kantor. ©Giraud/NAJA
Bruno Perramant,
Bruno Perramant, "La couverture rouge (Léviathan)", 2011. Huile sur toile. ©Giraud/NAJA
Yeondo Jung,
Yeondo Jung, "Guy série d'ici et d'ailleurs" (2015). Tirage photographique couleur sur papiers découpés assemblés dans un cadre boîte, son. ©Giraud/NAJA
Sarkis (Sarkis Zabumyan, dit),
Sarkis (Sarkis Zabumyan, dit), "Le bateau Kriegaschatz", 1982-2005.
Jean-Christophe Norman,
Jean-Christophe Norman, "Terre à terre" 2017. Le performeur et plasticien explore l’écriture aux quatre coins de la terre, réécrivant extraits ou totalité de romans illustres à la craie, à même le sol. Dans un projet d’écriture personnel, "Grand Mekong Hotel", il relate son récent séjour à Phnom Penh. Invité par le MAC VAL, il a réécrit son propre récit, page à page, sur la plus haute cimaise du musée. ©Giraud/NAJA
Arts visuels Arts plastiques Publié le 02/04/2019

17 000 disparus en mer, 6000 sur les routes africaines, femmes, hommes, enfants. Des centaines de milliers retenus dans des camps aux frontières de l’Union européenne, hommes, femmes, enfants. Échappant à la guerre, à l’esclavage, aux destructions de leurs maisons, à l’enrôlement forcé, aux tortures, aux viols, à la misère, à la faim, à l’exclusion, aux catastrophes climatiques. Et prétexte dans les pays d’Europe aux vagues populistes et nationalistes.

Migrant, ce n’est pourtant ni un métier, ni un destin. Sauf si l’on vous condamne à errer sans fin. Les artistes, les institutions culturelles qui, par nature, sont sensibles à l’humain, à son respect et à ses droits, mais aussi à ses heurs et malheurs, multiplient les manifestations qui rappellent sans faiblir ce sort de migrant. Particulièrement exposée, l’Italie avait accueilli en 2016, lors de la Triennale de Milan, une grande exposition invitant des artistes du monde entier à s’exprimer sur le sujet. Montages, vidéos, toiles, installations, maquettes occupaient les salles du Palazzo dell’Arte.

 

L’Atelier Artistes en exil. L’association Atelier Artistes en exil est l’une des dernières initiatives d’un accueil réservé à la nouvelle génération d’exilés, et d’un accompagnement de ses artistes. Peintres, étudiants en art, musiciens, poètes, ils ont parfois tout perdu, famille, maison, matériel de création, espoir surtout. À l’initiative de Judith Depaule (voir Pour n°203) quelques-uns ont pu partager un lieu, d’abord prêté par Emmaüs, et aujourd’hui au 102 de la rue des Poissonniers, Paris 12e. Leurs productions ont été exposées une première fois au musée national de l’histoire de l’immigration dans le cadre de Welcome !, son festival annuel migrations et hospitalité. Le musée, installé depuis 2007 au Palais de la Porte Dorée à Paris, a été imaginé comme un lieu de mémoire collective et d’histoires individuelles liées à l’immigration en France, faisant cohabiter les archives et les œuvres de sa collection d’art contemporain. On y retrouve Kader Attia, Bartolomeo Togo, les images de Mathieu Pernot, trois artistes emblématiques par leurs travaux sur l’invisibilité des drames intérieurs migratoires.

 

Persona grata, acte 1. En 2018, le musée de l’immigration a invité le MAC VAL de Vitry à créer avec lui un événement intitulé Persona grata (formule diplomatique signifiant « personne bienvenue ») pour lequel les deux institutions ont collaboré avec les philosophes Fabienne Brugière et Guillaume Le Blanc, auteurs de l’essai La Fin de l’hospitalité (Flammarion, 2017). Développée en deux lieux, jusqu’à janvier dernier, l’exposition voulait montrer les façons dont l’art contemporain s’empare de la question de l’hospitalité. L’une des conférences marquantes de Persona Grata, intitulée Hospitalité, entre éthique et politique, peut s’écouter en podcast sur le site du musée. Elle réunissait Isabelle Alfandary, présidente du Collège international de philosophie, Guillaume Le Blanc, professeur de philosophie à Paris-Est-Créteil et Magali Bessone, professeure de philosophie politique à l’université Rennes-1.

L’exposition-événement du Musée national de l’histoire de l’immigration se prolonge d’ailleurs à la maison de la Maison de la Culture d’Amiens qui l’accueille en entrée libre du 11 mars au 26 mai 2019. Le parcours de l’exposition se décompose en cinq parties : Appels d’urgence, Désenchantement, La main (dé)tendue, Should I stay or should I go?, Désirs d’horizons.

 

Persona grata ? au MAC VAL. « Nous avons défendu cette notion universelle et humaniste. Aujourd’hui, nous la posons à la lumière du réel, comme un sujet contemporain à interroger » explique le MAC VAL qui prolonge le propos avec une cinquantaine d’artistes, du XXe et du XXIe siècle. Le musée de Vitry a ouvert ses portes en 2005 avec l’idée de questionner les phénomènes de société à travers l’art contemporain, et en particulier la collection acquise par le Département depuis 1982. Le deuxième volet de Persona Grata, ouvert au public le 29 mars dernier, affiche cette fois un point d’interrogation. Si l’exposition reprend les grands thèmes de la première (le corps, la disparition, l’attente, l’accueil, le départ, la mobilité, l’errance, le conflit, l’urgence, la frontière…), elle les prolonge dans l’intime, là où le danger menace, et où la rencontre se fait parfois. « L’hospitalité est aujourd’hui en question, voire en danger. Si la ville de demain se dessine sur les côtes, les frontières et les jungles de l’Europe d’aujourd’hui, la gratitude et l’hospitalité n’en sont pas les piliers fondateurs » constatent les organisateurs.

Ces initiatives ne sont pas les seules. Partout le milieu de la culture se mobilise, parce que les migrants sont notre présent et notre avenir

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