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Michel Lagarde : « Le journal qui donne une identité au quartier Saint-Martin »

par Pierre Magnetto
Michel Lagarde, un label pour le village Saint-Martin. © Laura Coll/Naja
Michel Lagarde, un label pour le village Saint-Martin. © Laura Coll/Naja
A la pipe du Nord boulevard Magenta, une de ces boutiques spécialisées qui participent à l'identité du quartier. Des annonces illustrées, insérées dans le corps de la maquette. © Antoine Meurant
A la pipe du Nord boulevard Magenta, une de ces boutiques spécialisées qui participent à l'identité du quartier. Des annonces illustrées, insérées dans le corps de la maquette. © Antoine Meurant
Chez prune, bistrot branché du canal Saint-Martin, dont l'ouverture il y a vingt ans coïncide avec le renouveau du quartier. © Antoine Meurant
Chez prune, bistrot branché du canal Saint-Martin, dont l'ouverture il y a vingt ans coïncide avec le renouveau du quartier. © Antoine Meurant
Le Journal du village Saint-Martin, troisième numéro du trimestriel.
Le Journal du village Saint-Martin, troisième numéro du trimestriel.
Les éditions Lagarde au coeur du quartier Saint-Martin à Paris. © Laura Coll/Naja
Les éditions Lagarde au coeur du quartier Saint-Martin à Paris. © Laura Coll/Naja
Hors-Champs Insolite Publié le 09/07/2018
Lancé il y a six mois, "Le journal du village Saint-Martin", trimestriel diffusé gratuitement, a très vite trouvé son public. La publicité faite d'illustrations insérées dans le corps de la maquette participe à faire vivre la ligne éditoriale d'un journal de proximité, qui entend participer à la dynamique de transformation de son quartier.

Depuis plusieurs années la presse écrite rencontre de nombreuses difficultés, des titres disparaissent, c’est dans ce contexte que vous avez lancé il y a un peu plus de 6 mois Le journal du village Saint-Martin. Le défi n’est-il pas osé ?

Ce qui me donne confiance c’est de créer un modèle économique qui n’est pas celui de la plupart des journaux qui passent par les kiosques et une diffusion payante. Mon modèle économique et celui de la gratuité sur un territoire très limité. De ce fait, nous maîtrisons complètement la diffusion et la distribution. Nous n’avons pas de régie publicitaire, nous trouvons nous-mêmes nos annonceurs et les intégrons dans le corps de la maquette en faisant illustrer les annonces publicitaires. En fait, je ne me suis absolument pas dit, « Ah ! La presse va mal, ça va être impossible de faire un journal ». Je me suis plutôt dit que je vis dans un quartier extrêmement dynamique, avec énormément de commerces de proximité, avec des modèles de commerce innovants. J’avais envie de parler de ça, en créant un label de quartier, Le village Saint-Martin, que j’ai lancé il y a six ans d’abord sous forme de plan, puis de guide et maintenant de journal. Je me suis dit qu’il y avait un terreau absolument incroyable sur ces quelques rues situées entre le canal Saint-Martin et la Porte-Saint-Martin, et qu’à partir de ce petit territoire on pouvait à peu près tout faire, c’est-à-dire parler non seulement d’une vie de quartier, mais également de littérature, de dessin, de cinéma, de photo, sachant qu’on est dans un quartier où il y a beaucoup de lieux culturels et qu’à partir de là, le journal ouvre toutes les portes.

 

Vous parlez de création d’un modèle économique, mais qu’est-ce qui vous distingue d’un gratuit financé par la publicité, vous-même démarchez des annonceurs ?

Tout le monde ne peut pas être dans le journal ou dans notre guide. On peut toujours nous demander d’y apparaître mais nous sélectionnons nous-mêmes nos annonceurs en fonction de notre ligne éditoriale. Je préfère dire qu’il s’agit d’un partenariat, nous ne commercialisons pas les annonces comme de la publicité. Moi je vois ça comme un échange qui permet à la fois de faire vivre le projet éditorial, de participer à une dynamique de quartier qui bénéficie à tous et de payer les illustrateurs, les journalistes et l’imprimeur.

 

Vous évoquez votre projet éditorial, comment le définissez-vous ?

Le journal est en deux parties. La première est axée sur la vie de quartier et parle du renouvellement des commerces, des changements sociologiques. Pour le dernier numéro par exemple, nous partons des 20 ans de Prune* pour parler de la sociologie du quartier qui a commencé à se transformer il y a une vingtaine d’années avec un événement marquant, la coupe du monde de foot. C’est à peu près à ce moment-là que commence à s’opérer la transformation. On partait d’un quartier peu visité, un peu austère, alors qu’il avait déjà tous les atouts, comme le canal, et tout d’un coup survient la redécouverte du quartier, puis les changements sociologiques très marqués dans le Xe arrondissement et qui accompagnent le changement d’une ville comme Paris.

Dans la deuxième partie du journal, on aborde des domaines artistiques par le biais d’artistes qui résident dans le Xe. Ça permet d’ouvrir énormément de portes. En prenant juste le territoire comme point de départ, on peut parler absolument de tout.

 

Ca reste un pari compliqué, la presse régionale est elle aussi bien implantée sur son territoire. C’est quoi le truc en plus pour que ça marche ?

En fait, ce qu’on fait n’existait pas. On ne fait pas Le Parisien, on ne fait pas un quotidien, on fait quelque chose qui donne du sens, qui donne une identité à notre quartier. On est d’abord dans une démarche éditoriale, qui ensuite est rendue possible par des annonceurs, mais je ne parle pas d’un produit publicitaire, je parle d’un vrai produit éditorial avec une qualité à la fois d’illustration, de rédaction, en faisant appel aux meilleurs illustrateurs, à de bons graphistes, pour faire un beau journal, avec un beau papier. Souvent les premières réactions c’est « Ah ! Votre papier il est incroyable, c’est gratuit, comment c’est possible ? ». S’il y a cet étonnement c’est bien que le journal ne ressemble pas à des supports publicitaires que l’on peut trouver chez les commerçants. Je pense qu’il y a un vrai travail sur la forme et sur le fond, ce qui fait que ça se distingue, ça permet de susciter une curiosité, puis un intérêt. Alors qu’on vient de sortir le numéro 3, nous avons vu que le journal était attendu. En assurant la diffusion dans une centaine de points de distribution, nous avons directement les réactions des lecteurs qui nous disent parler plus de l’histoire, moins des bobos, de parler de l’histoire des commerces qui ont façonné l’image du quartier et des nouveaux entrants. Ce sont des réactions très intéressantes

 

Vous êtes présent sur le web mais de manière assez discrète. Le papier reste-t-il pour vous le support idéal ou travaillez-vous aussi au développement du numérique ?

En effet, il y a aussi une version en ligne qui pour l’instant n’est pas encore complètement au point par manque de temps, nous sommes une toute petite équipe. Mais dès la rentrée nous aurons tout le contenu du journal en ligne et puis évidemment après il y aura les réseaux sociaux, la communication que peuvent faire les commerces dont parle le journal, sur leurs propres réseaux. La notoriété du journal se fait d’abord par la distribution papier et ensuite par la diffusion numérique qui, pour l’instant, est à l’état embryonnaire avec le site du Grand quartier, qui est un grand projet immobilier au cœur du quartier. Ils nous ont proposé d’héberger le journal en ligne, ça leur permet de renforcer leur site et nous, ça nous offre une plateforme qu’on n’aurait pas eu forcément le temps ni les moyens nécessaires de développer.

 

* Prune, bistro branché, plutôt bobo, situé quai de Valmy sur le canal Saint-Martin.

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