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Serge Chaumier, « Les musées développent le discours »

par Véronique Giraud
Serge chaumière est directeur du Centre de recherche sur la culture et les musées. © Jean Luc BERTINI/Opale
Serge chaumière est directeur du Centre de recherche sur la culture et les musées. © Jean Luc BERTINI/Opale
Hors-Champs Croisement Publié le 04/12/2008
Les lieux d'expositions scientifiques sont en plein refonte depuis la fin des années 80. A une époque où le savoir est numérique, Serge Chaumier, qui dirige le Centre de recherche sur la culture et les musées, nous éclaire sur le rôle du musée dans le rapport entre science et société.

La science est-elle une discipline plus difficile à exposer qu'une autre ?

Il faut s’entendre sur les termes de la science. Elle couvre de nombreux domaines, des sciences humaines au musée d’ethnographie. Le musée apporte des codes de lecture et de compréhension. Cela n’aurait pas de sens aujourd’hui de montrer des objets sans les expliquer. On est entré dans une nouvelle ère depuis trente ans, où les musées développent le discours. Auparavant, on exposait des objets, des choses qui se donnaient à voir, qui revêtaient une symbolique. A la création du CNAM (Conservatoire national des arts et métiers), on était dans une logique scientifique, on présentait les objets pour l’étude, en tant qu’instruments des apprentis savants. Aujourd’hui, on les insère à l’intérieur d’un discours explicite. Dans les années 60, on a pensé des musées utiles pour faire des sciences, à l’attention du public scolaire. L’ensemble des musées évolue. La Cité des Sciences et de l’Industrie a été créée pour le grand public, elle n’a pas été conçue pour les chercheurs. Aujourd’hui, on observe un retour, pour certaines sciences, aux collections du musée. Pour des questions de patrimoine génétique par exemple, des études ADN portent sur les animaux conservés. Le musée redevient, dans certains cas, un lieu de recherche alors que cela avait perdu de son importance.

 

Sur quels principes, selon vous, la science doit-elle s'exposer ?

Les lieux sont plutôt tournés, à des fins de sensibilisation, vers la formation intellectuelle. Nous sommes dans une civilisation du loisir, il s’agit d’être attractif. L’exposition est moins une leçon et la sensibilisation à la science s’ouvre aux transversalités entre les disciplines, aspects sociaux, historiques, philosophiques… et aux débats autour de ses effets. Exposer sur la génétique ne peut se limiter à la science pure, les aspects philosophiques, éthiques sont abordés.

Le rôle du musée est à la fois de transmission de contenus et de média, pour que le citoyen se forge sa propre opinion. On n'est plus dans une période où la science est triomphante, on doute sur ses effets. Il en résulte plus d’humilité et un croisement avec philosophie, éthique, amenant le citoyen à faire ses choix. A partir d’une thématique, les nouveaux lieux d’expositions scientifiques, tels Agropolis Museum et l’INRA, offrent plus la vision d’une culture dont la science fait partie. Plus proche de la science encyclopédique du XVIIIe que du modèle unique du XIXe. La représentation de la science ne passe pas forcément par l’exposition. Selon le contenu, il est parfois plus judicieux de passer par une publication, par un site internet ou une conférence.

 

Des lieux à recommander ? 

Les CSTI, Centres de culture scientifique, technique et industrielle, sont des endroits remarquables. Créés dans les années 80, de plus en  plus d’expositions y sont organisées, les ouvrant de plus en plus à la société. Récemment, on peut citer Grenoble pour les nanotechnologies, Montbéliard pour l’alimentation, Villeneuve d’Asq, Bordeaux… Il ne faut pas nier toute démocratisation. Selon les lieux, selon les expositions, on attire des publics très variés, des scolaires aux familles. Pour ces dernières, les muséum d’histoire naturelle : La Rochelle, Toulouse, la Galerie de l’évolution, sont très prisés.

Ce qui est assez massif aujourd’hui, c’est que dans un même lieu, dans une même exposition, différents domaines scientifiques coexistent. Il y a une plus grande écoute des publics, l’objectif du musée est que la science soit mieux comprise, la recherche est ailleurs. Le musée est un lieu de rencontre. Ce qu’il propose peut être de l’ordre du jeu. Suprême illustration avec la nouvelle exposition Epidemik de la Cité des Sciences, conçue comme un jeu vidéo.

 

Bio : Serge Chaumier est professeur des universités et enseignant chercheur à l'université d'Artois à Arras depuis 2011. Il dirige le MEM (Master Expo-Muséographie). Ses publications  et recherches en muséographie et en muséologie prennent une part conséquente parmi ses activités. Auparavant enseignant chercheur à l'université de Bourgogne de 2000 à 2010. Directeur du Centre de recherche sur la culture et les musées.

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