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Mot de passe oublié ?Du 7 au 9 octobre, la Fiesta des Suds à Marseille fête ce qui aurait dû être sa trentième édition si n'avait été une année blanche en raison de la crise sanitaire et du confinement. Ce festival bigarré a su s’imposer comme un rendez-vous musical incontournable dans le Sud de la France dès ces premières éditions, voyant son assistance croître d’année en année. Bernard Aubert, président de l’association Latinissimo qui porte l’événement, et directeur artistique de la programmation musicale, voit dans ce succès les effets conjugués de quelques ingrédients savamment dosés. « Certes il y a d’autres festivals plus âgés en France, mais 30 ans avec l’esprit que nous avons et la façon dont nous avons organisé l’événement c’est quand même assez rare. Pour nous l’intérêt de l’histoire était de mélanger les genres et les sons et d’être capables de faire un événement festif, agréable à regarder et intéressant au niveau musical ».
Une programmation de musiques du monde. Depuis le départ, la Fiesta des Suds c’est une programmation de musiques du monde, avec la venue d’artistes de renommée internationale, d’autres méconnus et certains qui ne demandent qu’à être découverts. Paco de Lucia, Cesaria Evora, Gilberto Gil, Youssou N’Dour, Manu Dibango, Lili Boniche, Kassav’, Danyel Waro, Luz Casal, Yuri Buenaventura, Alain Bashung, Catherine Ringer, Herbie Hancock, Ray Barretto, Christophe, Patti Smith… sont quelques unes de ces têtes d’affiche qui ont assis la réputation de la Fiesta des Suds. Mais la présence des stars et des divas ne suffit à comprendre la singularité de cet événement. La Fiesta s’est ouverte à maintes influentes, se payant même le luxe en 1993 d’organiser la première techno party du Grand Sud avec Dockland, puis Asian Dub Foundation et bien d’autres les années suivantes.
2021 le melting-pot toujours. Pour cette nouvelle édition la Fiesta ne déroge pas à la règle du melting-pot, invitant Wookid, Selah Sue, Meute, The Avener Gaël Feye, Balthazar avec aux côtés de ces stars aux influences variées des artistes qui valent aussi le détour comme la chanteuse flamenca Rocio Marquez, l’afro-jazzman Laurent Bardeinne, ou encore, Instrumentarium un groupe de quatre électro-percussionnistes 100% marseillais. D’ailleurs, année après année des artistes marseillais sont à chaque fois de la fête.
Les recettes d’une programmation musicale. « Au bout de 30 ans nous sommes invités dans pas mal d’événements culturels. On écoute, on regarde puis on invite des gens dont on se dit qu’ils correspondent exactement à l’esprit Fiesta des Suds, à la programmation que nous aimons », explique Bernard Aubert, tout en se disant que parfois, le succès n’est pas couru d’avance. « Quand pour cette édition on rajoute Wookid le vendredi - électro-pop- avec dans la même soirée Laurent Bardainne qui est plutôt jazz, c’est un pari que nous faisons par rapport à l’écoute musicale des spectateurs. Mais chaque fois ça correspond à un intérêt des publics ». Le mélange des genres fait aussi de la Fiesta un événement multi-générationnel. « Dans le public il y a des gens de 16 à 80 ans », assure-t-il. La Fiesta, c’est aussi des bistrots et bodegas, des lieux où l’on danse et des afters qui durent fort tard. Pour la clôture, trois DJ marseillaise assureront le show jusqu’à 5 heures du matin.
L’architecture industrialo portuaire réinvestie. Difficile aussi de parler de la Fiesta sans évoquer les lieux qu’elle a investi au fil des années : pour la plupart du temps des anciennes installations portuaires ou logistiques en friche, situées à la périphérie du Grand Port Maritime de Marseille ou, sur son domaine avec des équipements qui furent directement liés au trafic portuaire comme l’ancienne gare maritime du môle J4 cette année. Les pérégrinations de la Fiesta correspondent aussi au périmètre d’Euroméditerrannée, vaste projet de rénovation urbaine lancé en 1995 par l’Etat et l’ancien Maire Robert Vigouroux. L’objectif, en faire un quartier d’affaire partant quasiment du centre-ville jusqu’au Nord de la ville. « Dès le départ de la Fiesta il y avait un enjeu », commente Bernard Aubert. « Nous avons investi les Docks de la Joliette alors en friche quand le président de la Chambre de commerce nous a dit « Faisons la Fiesta ici, nous, nous-nous en serviront pour valoriser ces espaces ». Aujourd’hui les anciens docks en déshérence à l’époque abritent un vaste centre commercial face aux Terrasses du Port et des bureaux dans les étages où se sont installés quelques institutions locales ou nationales.
Sur la piste d’Eruoméditerranée. « Parcourir l’album souvenir des trente ans, c’est voir défiler les transformations urbaines de Marseille et dessiner par l’itinérance du festival les contours d’un périmètre que l’on ne nommait pas encore Euroméditerranée : des Docks de la Joliette (1992-93) au J4 (1994-95 et depuis 2018), en passant par la Manufacture des Tabacs de la Belle-de-Mai (1996) ou les Docks des Suds à Arenc (de 1997 à 2017), la Fiesta s’est faite visionnaire, ré-enchantant une aire portuaire longtemps boudée par les Marseillais. Désormais, c’est ici que se réécrit une partie de l’avenir de la cité », écrit Olivier Rey, le responsable de la communication de Latinissimo.
De vieux gitans itinérants. « Nous sommes de vieux gitans, nous aimons bien nous promener. Quand on emmène les spectateurs, ce n’est pas seulement pour écouter des sons, mais pour découvrir des lieux qui ont marqué l’histoire de cette ville. Avant de transformer la ville, les élites ont souvent tendance à nier son passé. C’est important pour nous de montrer que Marseille possède des bâtiments qui permettraient de faire des événements culturels atypiques et surprenants », poursuit le directeur artistique. « L’esprit de la Fiesta est de dire qu’une ville est une addition de choses et de gens. C’est ce que nous faisons, on reproduit une ville en plus petit pour faire la fête ».
Partenaires particuliers. Un esprit qui n’a pas toujours été partagé par les institutions. Partenaire de la première heure, le département n’a jamais retiré son soutien, y compris après le changement de majorité en 2015. Seule grande absente, ou quasi absente, la ville de Marseille (et maintenant la métropole), qui s’est au plus contentée de distribuer quelques miettes. « Cette année, la ville est entrée dans l’histoire et ça nous fait bien plaisir », confie Bernard Aubert. « La nouvelle équipe municipale a considéré que cet événement méritait d’être soutenu. Nous allons dans les années futures vers un partenariat qui serait plus poussé. » La Fiesta pourrait alors accoler officiellement un nom de lieu à son patronyme. Tout comme il y a les Francofolies de la Rochelle, le Festival d’Avignon, les Trans Musicales de Rennes… il y aurait désormais «Les Docks des Suds de Marseille ». « Nous aimerions bien l’appeler ainsi parce que cet événement résume très fortement ce qu’est notre ville ».
Renseignements, réservations : https://fiestadessuds.com/