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Marseille Jazz des 5 continents :  » créer de la rencontre entre les artistes et le public »

par Pierre Magnetto
Hugues Kieffer, directeur du festival Marseille Jazz des 5 continents. © Clara Lafuente
Hugues Kieffer, directeur du festival Marseille Jazz des 5 continents. © Clara Lafuente
La 23e édition de Marseille Jazz des 5 continents se déroule sur 7 sites de la ville du 8 au 27 juillet. © Clara Lafuente
La 23e édition de Marseille Jazz des 5 continents se déroule sur 7 sites de la ville du 8 au 27 juillet. © Clara Lafuente
Musique Jazz Publié le 29/05/2023
Fidèle à sa réputation et à sa ligne artistique, Marseille Jazz des 5 continents a concocté une programmation porteuse de valeurs, de multiculturalisme et de musiques hybrides, proposant à la fois des artistes dont la réputation n’est plus à faire et de jeunes talents pleins de promesse. Rencontre avec Hugues Kieffer, son directeur.

C’est la 23e édition de Marseille Jazz des 5 continents. Comment le festival parvient-il à se renouveler chaque année ?

S’il y a un secret, il réside dans la ligne artistique fondatrice de ce festival. Elle est issue de la rencontre de ses deux créateurs*, l’un qui représentait le jazz, l’autre les musiques du monde. A l’époque ces musiques étaient séparées mais eux avaient cette vision que l’avenir résidait dans la fusion des musiques. Ils pensaient que ça pouvait donner la base d’un festival, d’un endroit où s’exprimerait la réalité de cette rencontre entre jazz et musiques du monde. Ça a commencé comme ça et puis ça s’est renforcé et cette fusion des jazz des 5 continents est de plus en plus actuelle. Je m’aperçois aujourd’hui que la plupart des artistes intègrent le jazz et ses codes tout en puisant dans une grande diversité de répertoires, de cultures, de sonorités, d’instruments pour créer une musique hybride qui à mon sens est à l’image du monde d’aujourd’hui. Dans ses conditions c’est facile de se renouveler.

Vous ouvrez le festival dans un nouveau lieu, le Théâtre de la Sucrière dans les quartiers Nord, avec deux créations. Faut-il voir un signal dans ces choix ?

Quand je conçois une programmation je la compose comme un commissaire d’exposition. Il y a un début, un parcours à travers des choses dont je veux parler concernant le monde d’aujourd’hui, en lien avec la ville de Marseille qui est notre point d’ancrage. Cette année il y de l’inédit avec ce nouveau lieu investi par le festival, le Théâtre de la Sucrière, un choix symbolique, mais aussi avec la présentation de créations qui est le signe de notre soutien aux artistes et à leurs projets. Cette soirée du 8 juillet ouverte à toutes et à tous gratuitement est composée de deux concerts inédits. Le premier célèbre les retrouvailles entre deux jeunes artistes Françaises et deux jeunes artistes Brésiliennes, un quartet 100% féminin. Le deuxième est inspiré par l’écrivain et poète américain Claude McKay, une figure sortant un peu de nulle part qui est revenue au cœur de l’actualité parce qu’un de ses livres a été retrouvé. Un artiste engagé, il était noir, homosexuel, communiste et exilé. Sa poésie était arrivée à Marseille dans années 1920 au moment où le jazz arrivait aussi. C’est une création du cinéaste Matthieu Verdeil et du musicien Lamine Diagne, tous deux marseillais

Aux lieux habituels du festival s’ajoutent cette année La Sucrière et le conservatoire Pierre Barbizet, pourquoi élargir le nombre de sites ?

A chaque site correspond un esprit particulier. La diversité des lieux permet de rencontrer une grande diversité de publics et d’offrir une grande diversité des modes d’écoute. Selon l’endroit où vous êtes, vous vous retrouvez assis, debout, en intime en petite jauge, ou alors en grosse jauge. Quand on a deux musiciens qui sont parmi les meilleurs du monde et qu’on les écoute dans un format réduit ça devient exceptionnel. La diversité des lieux de présentation permet de toucher toutes les formes de jazz et en les répartissant dans divers lieux de la ville de toucher tous les publics. Le jazz est une musique pour toutes et tous, une musique populaire ayant la capacité à dialoguer avec tout le monde.

Cette année la subvention de la ville de Marseille a été revue à la baisse. Quelles en sont les conséquences ?

La ville a réduit sa subvention de 30%. Cette situation n’est pas facile à gérer, surtout après les dures périodes que nous avons vécues et alors que les charges augmentent partout : les coûts des artistes, des transports, de l’hébergement, des matériels… Mais nous nous sommes reconnaissant de l’argent public de la ville de Marseille qui reste notre principal soutien. C’est dur à encaisser mais nous ne sommes ni tristes, ni vindicatifs. On essaye de se battre pour faire passer l’idée que ce que l’on fait sert au bien commun. Ce qui est touché en premier quand on a ce genre de baisse ce sont les actions gratuites que nous faisons au-delà du festival comme la médiation, les projets spéciaux pour les artistes locaux… les choses qui ne sont pas sensées rapporter de l’argent mais qui en coûtent. Nous devons construire un nouvel équilibre. Mais la vraie difficulté est de savoir sur quelle base on peut se projeter pour conserver l’esprit et la dynamique. Nous positivons en puisant dans nos fondamentaux. Nous sommes là pour créer la rencontre entre les artistes et le public, un festival ce n’est que ça finalement.

En septembre Marseille accueillera l’European Jazz Conférence organisée par l’European Jazz Network. Comment avez-vous accueilli cette nomination ?

Nous nous sommes battus pour organiser cet événement qui n’est jamais venu en France. Le réseau regroupe 180 structures, les plus gros festivals d’Europe. A chaque fois que j’y vais-je comprends pourquoi je fais ce métier, pourquoi j’existe. Partout en Europe il y a des gens qui se battent sur les mêmes thèmes artistiques que nous. Cette conférence c’est l’occasion d’échanger sur ce qu’est un festival, sur l’écologie, sur l’évolution économique d’un festival, sur le rapport aux artistes… Nous sommes très fiers d’avoir été désignés par le réseau. Maintenant nous avons obligation que ça se passe très bien en organisant les débats autour de la thématique que nous avons proposée : l’éducation musicale au sens large dont celui de l’inclusion ou comment la musique permet de rassembler les gens. Cet événement est aussi une plateforme de présentation de la jeune création locale et française. Il y aura 15 showcases avec de jeunes groupes qui se présenteront devant l’ensemble des programmateurs européens et c’est très important pour eux de se faire connaître.

*Marseille Jazz des 5 continents a été créé en 2000 Roger Luccioni, ancien adjoint au maire délégué aux musées et contrebassiste et, Bernard Souroque metteur en scène et ancien organisateur de la Feria de Nîmes, auxquels se sont joints Régis Guerbois actuel président du festival.

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La 23e édition de Marseille Jazz des 5 continents se déroule sur 7 sites de la ville du 8 au 27 juillet. © Clara Lafuente
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