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Mot de passe oublié ?Dans l’océan de civilisations, de recherches, de savoirs, de pensées et d’objets extraordinaires qu’enferme le musée de lq BnF au 5 de la rue Vivienne, les œuvres de l’artiste Barthélémy Toguo relaient les grands combats et les tragédies de l’humanité. Les collections, « patrimoine commun, identités collectives » comme les nomme le directeur artistique, ont été réagencées pour éclairer ce qu’elles recèlent de l’histoire mondiale et des liens entre les peuples. « Le monde pour horizon », titre choisi pour cette nouvelle saison de la BnF, ne pouvait mieux convenir à l’artiste congolais qui, faisant fi de la désapprobation familiale de devenir un artiste, a quitté le continent Afrique pour se former à l’art européen à Grenoble et à Düsseldorf. S’il a installé son atelier dans le 20e à Paris, ses inspirations proviennent des murmures du globe terrestre, d’humanités silencieuses, et des cris de la rue. Toguo les ramène à la surface et aux yeux du monde de ses œuvres qu’il pare de l’excellence de savoir-faire de tous horizons. Lors de la présentation de la saison, le président de l'institution rappelle que « la BnF a une mission très claire, celle de fortifier la chaîne universelle des savoirs et des œuvres ».
Depuis l'escalier d'honneur jusqu’aux salles prestigieuses, autrefois palais du Cardinal Mazarin, chacune de ses créations apporte un éclat contemporain de leurs couleurs fraichement appliquées, de leur porcelaine récemment fabriquée… Si derrière les ouvrages et les objets de la collection de la bibliothèque-musée se révèle la pensée et le savoir-faire de femmes et d’hommes, derrière les œuvres de l’artiste aussi français que camerounais se révèle une humanité ignorée, celle dont les droits sont bafoués, celle qui a traversé guerres et génocides, celle du grand continent Afrique, celle qui recherche pour guérir. Décrire chaque installation, chaque série, c’est nommer la souffrance ou l’espoir qui en est à l’origine.
Des œuvres réalisées in situ. S’y ajoutent, pour coller à l’invitation qui lui est faite d’investir ces salles, plusieurs œuvres réalisées in situ. Ainsi, dans la salle Barthélémy (du nom de l’abbé Barthélémy (1753-1795), garde du cabinet du roi), l’artiste a malicieusement posé deux grands vases en céramique surmontés de son portrait lui qui se prénomme Barthélémy. Dans cette salle qui présente un aperçu des collections de monnaies et médailles de la BnF, l’artiste camerounais a ajouté une série de médailles représentant les personnalités qui ont compté dans l’histoire de l’Afrique. Elles surplombent la salle sur les garde-corps de la mezzanine.
Dans le salon Louis XV, s’imposent deux des 18 grands vases « Vaincre le virus » (un ensemble réalisé pour la sélection finale du Prix Marcel Duchamp 2016). La décoration de ces vases en porcelaine s’inspire de modèles de cellules infectées et de virus observées à l’Institut Pasteur où l’artiste avait passé plusieurs mois auprès des équipes de chercheurs des virus du Sida et Ebola. Les vases font face à deux pagodes chinoises d'une taille exceptionnelle "qui ont été confisquées par les armées révolutionnaires françaises qui ont contribué à renverser le prince d'Orange-Nassau en 1795 et emportées en France" informe Emmanuel Coquery, directeur du développement culturel. Ces œuvres, que plusieurs siècles séparent, ont en commun d’avoir été fabriquées à Jingdezhen, la ville chinoise de la céramique .
Au fil du parcours, toutes ces œuvres trouvent leur place parmi les objets des collections de la Bnf. Une évidence qui a de quoi surprendre tant les allusions des créations de Toguo reflètent le monde d’aujourd’hui. C’est que cet artiste, qui s’est donné pour moteur de ses créations et pour horizon les souffrances de nos sociétés, prend grand soin de leur fabrication. Que ce soit le bleu qu’il a créé à Sèvres, ou la porcelaine de Chine, seul pays où il est possible de cuire des vases de huit mètres de haut, ou encore le zingana un bois du Cameroun… Passeur des savoir-faire artisanaux ancestraux, qui lui ont fait faire le tour du monde, Barthélémy Toguo a en tous sens « Le monde pour horizon ». Ses œuvres offrent à qui veut bien s’en donner la peine un puissant écho au voyage des idées et des savoirs qu’offre la BnF.
Le monde pour Horizon, saison 2024-2025. Artiste invité : Barthélémy Toguo. BnF Richelieu, 5 rue Vivienne, Paris 2e. Du 21 septembre au 7 septembre 2025.