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Mot de passe oublié ?Connue pour son travail de scénariste sur des œuvres comme Yao, Les Amandiers, ou encore Tout de suite maintenant, Agnès de Sacy réalise son premier long métrage, La Fille d’un grand amour, qui sortira en salle le 8 janvier. La réalisatrice était au Cinemed de Montpellier pour l’avant-première, le 24 octobre. Autobiographie romancée, le film raconte l’histoire d’une étudiante en cinéma qui fait un documentaire sur ses parents, divorcés, et leur rencontre. Touchés par ces souvenirs, les parents se rapprochent jusqu’à se remarier, oubliant, dans ce moment d’euphorie, la raison principale de leur divorce. Inspiré de sa vie, mais transformé en fiction par le changement des noms et les libertés prises à l’écriture, le film traite d’un amour pur et sincère, bien que peu conventionnel.
Tout commence par un lourd secret. Pendant le confinement lié au Covid, Agnès de Sacy retourne dans sa maison familiale pour rester avec son père, qui vivait seul depuis le décès de sa mère. Il se confie alors à elle sur son passé, et sur sa sexualité refoulée. Il lui explique que, dans les années 50, il avait suivi une thérapie de conversion, prescrite par son médecin. Ces pratiques ne sont interdites en France que depuis 2022 et sont aujourd’hui encore pratiquées dans plusieurs pays de la société occidentale, comme l’Italie et certains états des États-Unis. Lorsque la réalisatrice lui a demandé pourquoi il se confiait ainsi, son père a répondu « pour que tu en fasses quelque chose ». Et c’est ce qu’elle a fait ! Depuis plusieurs années, le producteur Philippe Godeau l’incitait à écrire un film sur l’histoire d’amour rocambolesque de ses parents, et cette conversation avec son père a été le déclic. Agnès de Sacy a alors collaboré à l’écriture du scénario avec Michel Spinosa, qui offrait un œil extérieur afin que l’histoire ne soit pas trop personnelle et puisse être appréciée universellement.
Un casting fictif. Agnès de Sacy a tenté de se débarrasser de l’idée d’un casting qui ressemblerait aux personnes réelles. Elle avait déjà travaillé avec Isabelle Carré sur la première adaptation du livre de l’actrice, Les rêveurs (qui sortira en 2025). Ce choix de casting, qui s’est fait très vite après l’écriture du scénario, lui a permis de se détacher de l’image de sa mère. Pour interpréter Yves, le père, elle choisit François Damiens car « il a cette gravité et cette légèreté à la fois », qui permet de ne pas sombrer dans le mélodrame. Il pouvait apporter une touche d’autodérision à ce personnage en pleine dépression. Enfin, pour son propre rôle, c’est la jeune Claire Duburcq qui est choisie, pour sa capacité d’écoute lors de l’audition. Le personnage de Cécile devait en effet écouter attentivement ses deux parents, et ne pas prendre parti dans leurs souffrances, bien qu’elle s’inquiète sans cesse pour eux. Ana et Yves ont chacun une personnalité qui leur est propre et une vie indépendante l’un de l’autre. « Je trouvais important que, dans leur histoire, chacun ait sa vie amoureuse et sexuelle » dit la réalisatrice, qui ne voulait pas que l'épouse soit juste un personnage d’appui qui aide l’homme à trouver qui il est.
Réalité VS. Fiction. La maison de ses parents fait office de lieu de tournage. Son père y fait une apparition dans le film qu’il ne verra jamais car il décède pendant le montage. « La maison et la nature autour, pour moi, sont des personnages » explique la réalisatrice. La propriété se situe à la frontière de l’Espagne, d’où était originaire la mère de la réalisatrice. Une chaîne de montagnes frontalières est visible en arrière-plan, comme un rappel constant d’une échappatoire si proche et pourtant inatteignable. Certaines scènes ont été tournées en Espagne, à Portbou. Autre point de réalité, c’est d’un documentaire qu’elle a réalisé pour Arte, à la sortie de ses études à la Femis, qu’Agnès de Sacy s’inspire pour son film. La réalisatrice en a repris les dialogues, témoignages de l’amour qui régnait entre ses parents. « Ils ont la nostalgie de l’intensité de leur amour », dit-elle. C’est ainsi que naît le projet de La Fille d’un grand amour. Car, si l’amour de ses parents n’est pas né d’une relation hétérosexuelle conventionnelle, il fut sincère. Son homosexualité ne contredisait pas l’amour que son père avait pour sa mère. « L’ambivalence des êtres », c'est ce qu’Agnès de Sacy a voulu montrer avec son film.