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Mot de passe oublié ?En suivant les réalisations de Gilles Perraudin, on a envie de croire que l’architecture peut accompagner une vie d’homme. Choisissant d’utiliser un matière première recalée au XXe siècle par les professionnels de la construction, lui se positionne à contre-courant du mouvement moderne, dont l’usage intensif du béton et du verre, et leur corollaire la climatisation, ont largement contribuer à rendre notre planète infernale. Cette matière, c’est la pierre. L'architecte la décrivait ainsi en août dernier dans Le monde : « La pierre est un matériau qui respire. Elle rejette dans la journée l’humidité qu’elle a absorbée durant la nuit, rafraîchit ainsi naturellement l’atmosphère… C’est une ressource quasiment inépuisable – la Terre est faite de pierre – et qu’on peut réutiliser indéfiniment. Par ailleurs, elle ne pollue pas – du moins quand on la monte à sec. Sa taille demande très peu d’énergie. Son bilan carbone est d’autant plus faible qu’on peut la transporter en bateau ou en train ».
L’argument paraît irréfutable, et Gilles Perraudin l'a prouvé en expérimentant en plusieurs endroits l’usage principal de la pierre et d’autres matériaux biosourcés dans ses constructions, qu’elles soient publiques ou privées. Un chai à Vauvert dans le Gard, le pavillon d’accueil des carrières de Fontvieille dans les Bouches-du-Rhône. Deux zones géographiques subissant depuis longtemps des températures estivales extrêmes.
En expérimentant la pierre, l’architecte renoue avec les enseignements d’André Ravéreau (1919-2017), grand spécialiste de l’architecture du Sahara, auprès de qui Gilles Perraudin a passé plusieurs mois en stage dans sa jeunesse, dans la vallée du M’zab, en Algérie. André Ravéreau avait érigé en règle d’or le principe d’adéquation entre la matière, le climat et les formes de l’architecture. « Il faut laisser la matière dicter sa loi » préconise aujourd'hui Gilles Perraudin dont l’atelier est distingué aujourd’hui par le grand prix national de l’architecture 2024.
Sur proposition du jury pour auditionner sept agences présélectionnées pour ce prix prestigieux, le ministère de la Culture a finalement attribué cette haute distinction à l’agence française établie en France pour l’ensemble de son œuvre. Les critères de sélection des lauréats ont été les suivants : la richesse du parcours professionnel et la qualité de l’œuvre bâtie ; la posture de l’agence vis-à-vis du rôle sociétal de l’architecture et de l’architecte ; la capacité à diffuser ou transmettre, en France et à l’international ; la capacité à innover et à ouvrir des perspectives pour les nouvelles générations. « Très sensible à l'architecture vernaculaire et à la relation homme-climat-habitat, Gilles Perraudin fut lauréat en 1980 du premier concours européen d'énergie solaire passive, grâce à une maison qui contient déjà tous les grands principes appliqués dans ses futures réalisations" rappelle le ministère. "C'est notamment le cas de 'l'enveloppe microclimatique', qui trouvera son parachèvement dans le projet de l'Akadémie Mont-Cenis de Herne en Allemagne et du Collège de Vauvert (non construit à l'heure actuelle).»
Une exposition monographique, dédiée à l’équipe de l’Atelier Architecture Perraudin sera programmée à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine. Gilles et son fils Jean-Manuel Perraudin assureront des conférences à destination des étudiants en architecture.
Né en 1949, Gille Perraudin a mené des études d'ingénierie à l'École de La Martinière à Lyon (1970), puis d'architecture à l'École d'architecture de Lyon (1977). Il s'est associé entre 1980 et 1998 avec Françoise-Hélène Jourda, avant de poursuivre seul son activité de 1998 à 2017. Cette année-là, il fonde l'Atelier Architecture Perraudin avec son fils Jean-Manuel. En parallèle, il a enseigné en France et à l'étranger de 1996 à 2014.