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Heka, la magie de Gandini Juggling à La Garance

par Véronique Giraud
HEKA, Gandini Juggling © Camilla Greenwell
HEKA, Gandini Juggling © Camilla Greenwell
La compagnie Gandini Juggling sur la scène de La Garance pour créer Heka en décembre. © Camilla Greenwell
La compagnie Gandini Juggling sur la scène de La Garance pour créer Heka en décembre. © Camilla Greenwell
La jongleuse coréenne Kim Huynh © Camilla Greenwell
La jongleuse coréenne Kim Huynh © Camilla Greenwell
Arts vivants Interdisciplinaire Publié le 20/12/2024
Un spectacle de magie ne se reçoit pas toujours de la même façon. Dans l’unique scène nationale du Vaucluse, La Garance, le festival manip’ déploie la magie nouvelle comme une manière - un art - de toucher au cœur et à l’esprit la population d’un vaste territoire autour de Cavaillon.

« La magie doit être spectaculaire. La magie doit être efficace » assène avec humour Sean Gandini dans le nouveau spectacle de la compagnie internationale de jonglage Gandini Juggling. Le chorégraphe anglais a eu cette fois envie de collaborer avec le magicien Yann Frisch pour frotter l’excellence du jonglage à l’art de… la manipulation et la chorégraphie à la gestuelle du magicien. Cela donne Heka, tout n’est qu’un faux semblant, présenté en première mondiale à La Garance, scène nationale du Vaucluse à Cavaillon. Après plusieurs résidences et, in fine, deux semaines de répétition à La Garance, la compagnie de jonglage virtuose s’est produite sur le plateau vauclusien pour la première fois avec son opus Heka, tout n’est qu’un faux semblant les 10 et 11 décembre. Devançant le Théâtre de la Ville à Paris et les multiples villes de France où ce spectacle prodigieux sera diffusé.

Après une présentation en bonne et due forme de la directrice du lieu, Chloé Tournier, une attention au public assez rare, place est faite au spectacle. Une jeune femme s’avance sur scène, derrière une longue table jusqu'à s'immobiliser debout, face au public, au centre du plateau immaculé. Soudain une de ses manches se soulève, puis l’autre. L’expression contrariée de Kim Huynh fait comprendre que toute volonté est indépendante de ce désordre. La magie est installée. Une fois assise, les mains de la jongleuse se démultiplient, alignées, enchevêtrées, apparaissant et disparaissant à un rythme infernal. Silencieusement et avec élégance, ce numéro facétieux introduit le spectacle qui dira autant qu’il émerveillera. On est bien loin du lanceur de couteaux ou du découpeur de partenaires forcément féminines, loin aussi du prestidigitateur aux tours habiles. La famille de la magie s’est agrandie, s’est dégenrée, un grand renouvellement qui offre une expérience qui a plus en commun les exercices de déduction du Sherlock Holmes de Conan Doyle que la puissance illusionniste du Mandrake de Lee Falk.

 

Les dessus et les dessous de la magie. En donnant à sa création le nom de la divinité égyptienne qui personnifie la puissance magique, en quelque sorte la magie même, la compagnie Gandini Juggling porte loin et haut son ambition d’infiltrer la magie dans le spectaculaire. Décortiquant, par la répétition, les ruptures de rythmes, les retards étudiés, l’excellence du jonglage, les mille et une façons de faire magie, le groupe nous emporte bien plus loin que la sidération procurée par un tour de mains prodigieux, ou l’amusement d’avoir été berné. S’il manipule c’est en alliant une succession de tableaux jonglés avec grâce et un code vestimentaire magnifiquement hybride à une chorégraphie et une narration qui s’émancipent des codes habituels de la magie. L’adresse de Sean Gandini, que ses pas souples de danseur mènent au-devant de la scène pour parler au public, ne font en rien redondance du numéro qui a enthousiasmé juste avant. Excepté l’humour, qui s’invite partout.

Écouter parler Sean Gandini avec son délicieux accent anglais c’est accepter de scruter les dessus et les dessous de la magie. Non pas en divulguant les « trucs », mais en tenant des propos capables de lancer le doute sur nos certitudes, d’ébranler nos croyances, de faire comprendre que la manipulation est le propre de l’homme. Par son langage, puisqu’en déplaçant l’ordre des mots d’une phrase ou en utilisant la négation, un sens nouveau apparaît comme par magie. Tout va très vite, il ne s’agit pas de s’appesantir, « la magie doit être efficace et spectaculaire » rappelle Gandini. Mais ce à quoi parvient la compagnie c’est à distiller illusion et intelligence tout en maintenant l'esprit du public en alerte. Une merveille !

 

Heka, tout n’est qu’un faux semblant. Mise en scène : Sean Gandini, Kati Yla-Hokkala. Avec : Kate Boschetti, Sean Gandini, Tedros Girmaye, Kim Huynh, Sakari Mannisto, Yu-Hsien Wu, Kati Yla-Hokkala.

En France. Du 21 au 29 décembre au Théâtre des Abbesses - Paris. Du 9 au 11 janvier 2025 à Orléans SN. Les 20 et 21 janvier au Théâtre du Bois de l'Aune - Aix en Provence. Le 1er avril, scène nationale d'Alençon. Les 27 et 28 mai à La Comère, SN de Châlons-en-Champagne. Tournée anglaise en février 2025. Tournée suédoise en mars 2025.

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