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Mot de passe oublié ?Comment avez-vous réagi à la suppression de la subvention de la région Pays de la Loire ?
Nous avons appris la décision fin novembre, avant même qu’elle soit votée par le Conseil Régional, par un courrier type reçu par mail. Le même courrier que celui envoyé à tous ceux qui ont subi des coupes : acteurs culturels, lieux, compagnies, milieu associatif… Ça a été fait de manière très brutale et surtout sur une temporalité assez vertigineuse pour la plupart de nos camarades. Nous, en tant qu’Établissement Public de Coopération Culturelle, nous bénéficions d’un contrat de décentralisation dramatique dans lequel la région est engagée, ce qui nous protège un tout petit peu. Une partie de la subvention, 50 000 euros, a été affectée à 2025, l’autre, 150 000 euros, sera effective en décembre pour l’année 2026. Donc cette suppression impacte davantage la saison prochaine. Les centres dramatiques nationaux sont tous accompagnés depuis leur création par les tutelles du territoire. Il y a donc eu la méthode et aussi la chronologie, mais plus profondément cette suppression représente non pas une séquence économique temporaire - parce qu’on peut imaginer affronter des difficultés économiques une année et pas les suivantes - mais, la décision de la région porte sur le fondement même du financement de la culture en France. C’est là-dessus que porte la gravité de la décision. Que la France, les régions, les départements et les villes soient en difficulté on peut le comprendre et on peut assumer ensemble, mais pour ça il faut travailler à impacter le moins possible un tissu économique local. En tant que centre d’art dramatique, nous avons des responsabilités vis-à-vis des artistes, des compagnies, des techniciens, des prestataires.
D'autres collectivités ont-elles aussi réduit leur subvention ?
Non, pas ici. Le département avait diminué légèrement la sienne en 2024, mais c’est loin d’être le plus important des financements que l’on reçoit. En revanche, la ville d’Angers essaye de travailler à dégager un financement exceptionnel pour pallier un peu le retrait de la région. Évidemment elle ne couvrira pas la totalité de la somme, mais il y a une prise de conscience manifeste.
Quel va être concrètement l’impact sur l’activité du théâtre ?
En 2025 nous voulons maintenir la programmation proposée au public, mais on sait déjà que sur la saison à venir nous n’aurons que 43 spectacles au lieu de 59, que l’on passera de 190 représentations à 120, de 52 000 places offertes à 50 000. Les 200 000 euros représentent 20% de ce qu’on appelle le disponible pour l’artistique, une fois déduites toutes les charges. On essaye que l’impact soit le plus allégé possible mais à un moment on ne peut pas ne pas payer l’électricité, la sécurité… donc cette mesure touche directement l’argent destiné aux équipes artistiques alors que c’est notre mission première.
Et pour ce qui est de l’action culturelle ?
En tant que théâtre nous ne faisons pas totalement la différence entre création et action culturelle. Nous essayons de faire en sorte que les artistes présents en création puissent aller animer des activités sur le territoire, dans les écoles, les lycées, à la prison : un travail extrêmement large en lien direct avec la population. Ceci dit, nous attendons encore que l’État définisse ce qu’il attribuera au financement de la création, mais selon la DRAC il ne devrait pas y avoir de baisse de ce côté-là. En revanche, pour ce qui est du financement alloué à l’action culturelle, on n’en connaît pas encore les montants. Donc on attend des chiffres pour nous organiser et savoir ce qui sera réalisable ou pas la saison prochaine. Par exemple une de nos actions prise en charge par la région s’adresse aux lycées. Pourrons-nous poursuivre quand même ? Nous ne pouvons pas les abandonner, les laisser sur le carreau sous prétexte qu’on ne reçoit plus d’argent de la région. 6 000 lycéens viennent au Quai pendant la saison, on ne va pas leur dire non on ne s’occupe plus des dispositifs que nous avons mis en place, d’autant que ce type de dispositif est toujours le fruit d’un travail de nombreuses années. La confiance des établissements, le lien avec les profs, ça se construit petit à petit dans la durée. Couper court à tout ça est d’une brutalité inouïe. Nous, on continue, on essaye de voir comment faire, point après point : les transports des lycéens, leur présence, la présence des artistes... Nous travaillons afin de pouvoir maintenir cette main tendue.