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Mot de passe oublié ?Depuis le 2 avril une sculpture-girouette géante trône au sommet de la Tour du Roi René. Elle oriente le regard des Marseillais vers le fort Saint-Jean, cet ancien fort militaire situé à l’entrée du Vieux-Port qui, après avoir connu plusieurs vies depuis sa construction débutée au XIIe siècle, fait partie intégrante du Mucem depuis sa création en 2013. « Icare, Us, Elle », (tel est le nom de cette œuvre en cuivre étamé et en verre), est le signal de ralliement de l’exposition « Au fort, les âmes sont », créée par l’artiste contemporaine Laure Prouvost, à qui le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée a donné carte blanche jusqu’au 28 septembre.
L’engagement du Mucem dans la création contemporaine Cette exposition dont l’accès est libre fait événement en premier lieu parce que c’est la première fois que l’artiste présente son travail à Marseille, hormis la projection d’une vidéo dans le cadre du Festival International de Cinéma de Marseille en 2023 et de l’escale sur le Vieux-Port en 2024 du voilier du festival Art Explora dont elle a conçu la voile. « Laure Prouvost est une artiste que toute institution rêve d’accueillir pour la qualité de son travail séduisant et inouï, pour son aura internationale, mais aussi parce que travailler à ses côtés est une aventure intellectuelle, artistique et humaine », souligne Hélia Paukner, conservatrice du patrimoine, responsable du pôle Art contemporain du musée et commissaire de l’exposition. La présence de l’artiste marque une nouvelle fois « l’engagement du Mucem dans la création contemporaine et les grandes questions de notre temps », souligne de son côté Pierre-Olivier Costa, son président.
Dialogue entre art contemporain et patrimoine architectural Laure Prouvost a spécialement conçu pour l’exposition quatre installations, dont la girouette qui revisite au féminin le mythe d’Icare tombé dans la mer pour s’être approché trop près du soleil, une invitation à « renouer avec la nature plutôt que de s’en prémunir ». Les trois autres installations conduisent les visiteurs dans des lieux habituellement inaccessibles au public du fort Saint-Jean. La salle du dépôt accueille « Sous les flots les Âmes Sont », installation créée autour d’une vidéo tournée sous l’eau dans la rade de Marseille, dans laquelle les humains s’hybrident avec la faune, la flore, des objets du quotidien. Dans la chapelle Saint-Jean l’artiste propose « Mire le Mirage », une sélection d’objets du quotidien picorés dans les collections du musée, répliqués en verre avec le concours du Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques de Marseille, et présentés en son et lumière. Dans la salle de la casemate, enfin, avec « Into All That Is Here », Laure Prouvost fait une proposition mêlant vidéo, végétaux, résine et mobile en verre. Une création inspirée par les jardiniers du fort Saint-Jean cultivant un jardin aromatique mais aussi par des récits mythologiques.
« Nous volons trop près du soleil » Inscrivant son travail artistique dans une démarche écoféministe, Laure Prouvost a été impressionnée par les lieux, y puisant une source d’inspiration. « Il est vraiment « fort » ce fort ! Il est fort dans tous les sens, que ce soit au niveau émotionnel, la beauté de la pierre et de l’eau qui se touchent, ce regard vers la Méditerranée, vers le nord de l’Afrique, cela crée tellement de sensations et de dialogues avec le monde », commente-t-elle. « A partir de l’eau et de la pierre j’ai souhaité raconter un conte inspiré du mythe d’Icare, qui s’appelle « Icare-Us-Elle », car l’humanité est féminine. Le point de départ c’est nous, notre mode de vie contemporain, notre rapport à la consommation : nous allons trop vite, trop loin, au-delà de nos limites. Nous volons vraiment trop près du soleil et on se brûle les ailes, on tombe et on se dissout dans la mer. »
Une installation monumentale à la Vieille Charité Artiste de renommée internationale, Laure Prouvost a notamment reçu le prix Max Mara Art Prize for women en 2012 et le Turner Prize en 2013. Exposée dans de nombreux musées dans le monde, elle a représenté la France lors de la 58e Biennale d’art contemporain de Venise en 2019. En parallèle de « Au fort les Âmes Sont », Laure Prouvost expose aussi à la chapelle du Centre de la Vieille Charité à Marseille jusqu’au 1 janvier 2026. « Mère We Sea », une installation monumentale spécialement créée pour ce lieu que l’artiste présente « comme une figure maternelle et féconde, convoquant également les mémoires de celles et de ceux qui, tout au long des trois derniers siècles ont habité et fait vivre cet espace et le quartier du Panier ».