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Mot de passe oublié ?Les vingt-quatre vitrines du passage bordant l’enceinte circulaire de béton nu ont été offertes au cinéaste et sculpteur libanais Ali Charri, devenues autant d’écrins pour ses réinterprétations d’objets anciens, archéologiques, dans l’esprit d’une réparation. À l’intérieur de l’immense Rotonde et sous la magnifique verrière, est projeté sur grand écran un film d’Arthur Jafa, Love is the Message, the Message is Death, où alternent comme une mosaïque les figures iconiques de la culture noire américaine et des scènes de la vie quotidienne.
De nombreux artistes sont nés en Afrique : la photographe queer sud-africaine Zanele Muholi, Marlene Dumas et William Kentridge, tous deux artistes blancs natifs d'Afrique du Sud, le peintre ghanéen Gideon Appah et l’assemblagiste conceptuel béninois Georges Adéagbo, la peintre Kudzanai-Violet Hwami, native du Zimbabwe et vivant à Londres. Senga Nengudi, Deana Lawson, Kara Walker, La Toya Ruby Frazier, Lorna Simpson, Arthur Jafa sont eux afro-américains, comme Terry Adkins (1953-2014).
Aux murs, les grands portraits fictifs de personnages noirs de l’Anglo-Ghanéenne Lynette Yiadom-Boakye transposent, à la manière d’Édouard Manet ou d’Edgar Degas, une revanche par l’art d’un système et d’une histoire dominés par l’homme blanc. Les installations hyperréalistes de Duane Hamson, avec ses sculptures grandeur nature du rêve américain à l’envers, cohabitent avec les photographies de Diane et Allan Arbus, Richard Avedon, Irving Penn, Man Ray et LaToya Ruby Frazier. L'exposition donne à voir la première exposition monographique en France de la photographe africaine américaine Deana Lawson qui saisit ses modèles dans un cadre domestique en leur demandant de fixer l’objectif pour des regards inattendus et troublants. La force suggestive de l'art exerce son pouvoir de dénonciation.
En fin de parcours, dans une haute salle plongée dans l’obscurité, pendent huit immenses toiles de l’Allemand Georg Baselitz (Série Avignon, Was ist gewesen, vorbei, 2014) qui, depuis 1969, a entrepris de peindre les corps tête en bas. La vision de ces huit corps suspendus, noyés dans la matière peinte, est envoûtante. C'est avec une haute sculpture de Georg Baselitz que débute le parcours dans le vestibule de la Bourse de Commerce. Réalisée en bois de cèdre, puis colorée de peinture à l’huile, l'œuvre est un autoportrait colossal de l’artiste, qui se représente enfant et tient entre ses mains un crâne. Meine neue Mütze (My New Cap, 2003) est sa toute première sculpture‐autoportrait.
Ces variations, qu’elles soient peintures, sculptures, installations, photographies, vidéos, animations, affirment une esthétique neuve, revendicative, dénonciatrice, de la représentation du corps. Se réappropriant des courants du passé pour écrire de toutes nouvelles pages de l'histoire de l'art. Autant de renversements des pouvoirs, de l'esprit de lutte et de contestation, qui résonnent étrangement dans ce temple du commerce.