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Mot de passe oublié ?L’Âme idéale est le premier long-métrage de fiction réalisé par Alice Vial. Connue pour ses court-métrages Les Innocentes, nominé aux Césars 2017, et Les Bigorneaux, prix du meilleur court-métrage des Césars 2018, elle était au festival Cinemed de Montpellier pour l’avant-première. Elle était accompagnée du scénariste Jean-Toussaint Bernard, de l’actrice québécoise Magalie Lépine-Blondeau dont c'est le premier film tourné en France, et de l’acteur Jonathan Cohen. Ce dernier disait « Je suis halluciné, depuis que je suis arrivé, de voir la quantité de films, de voir la qualité des films… On a trop de chance d’inscrire notre film dans ce festival-là. »
Le film suit Elsa (Magalie Lépine-Blondeau), médecin en soins palliatifs qui peine à construire des relations durables à cause de son don : voir les morts, et les aider à passer dans l’au-delà. C’est alors qu’entre en jeu Oscar (Cohen), qui lui redonne espoir, mais peut-être à tort. À l’origine du projet, le scénariste Jean-Toussaint Bernard, qui apprécie beaucoup le travail d’Alice Vial, l’a invitée à co-scénariser et réaliser le film. Si l’histoire partait de l'idée fantastique d'une passeuse d’âme, elle a très vite raisonné personnellement pour les deux scénaristes, les motivant à approfondir le sujet. « En France, on a beaucoup de mal avec le fantastique – même si ce film, on ne peut pas le qualifier exactement de fantastique » soulignait Jonathan Cohen.
La rencontre du classique et du novateur. Le concept de comédies romantiques sur les fantômes a été très exploré, notamment dans les années 80/90, et les co-scénaristes se sont beaucoup référé au film Ghost, à la fois pour s’en inspirer et s’en émanciper. Pari réussi car le film n’entre pas dans le cliché, tout en utilisant des concepts classiques. Les questions posées par le film sont universelles : « est-ce que j’ai assez vécu ? », « est-ce que j’ai assez aimé ? »… Sans prétendre y répondre, L’Âme idéale les met en perspective et n’a pas peur d’aborder les sujets courants. Les scénaristes jouent notamment avec l’image de la lumière au bout du tunnel, très présente dans la conscience collective, sans toutefois entrer dans le « kitsch ». Ils souhaitaient ne pas nier ou mettre de côté cet imaginaire commun, qui fait partie du peu que l’on semble connaître de la mort. Le film ne présente pas d’hypothèses sur l’au-delà, et la réalisatrice se dit « croyante, non, mais ouverte à l’idée qu’on ne sait pas grand chose. »
Une comédie dramatique équilibrée. L’Âme idéale oscille entre comédie et drame. Le côté fort du film est qu'il navigue entre les deux, tout en respectant l’essence des personnages et le sujet du film. Cet équilibre est, entre autres, amené par des scènes d’Elsa créant des liens étroits, intimes, avec les esprits, entrecoupés du point de vue du monde extérieur, qui la juge comme « folle ». Le jeu de Magalie Lépine-Blondeau, dans ces scènes à double point de vue, fait autant rire qu’il attriste, mettant en avant sa solitude et son ostracisation. Oscar, dans son histoire tragique et ses dialogues empreints d’humour noir, apporte également beaucoup à cette dynamique. Si Jonathan Cohen était questionné par certains lors du festival quant à sa capacité à jouer le drame, étant connu principalement dans la comédie, il a su faire taire ces doutes avec sa performance émouvante. « Je pense que c’est votre job de mettre des étiquettes et de mettre les gens dans des cases, et je le comprends aussi » disait-il à ce sujet, ajoutant qu’il est heureux de constater que tel n’est pas le cas dans son milieu, où des rôles en tous genres lui sont proposés.
Seuls, dans la vie comme dans la mort. L’Âme idéale, qui aborde beaucoup le sujet de la solitude de ses personnages, qu'ils soient vivants ou morts. Le tournage a eu comme cadre Le Havre, une ville riche de décors mais également intéressante scénaristiquement. « C’était super important, pour raconter l’histoire d’Elsa, que ça se passe dans une grande ville » expliquait Alice Vial, car le sentiment d’être seul entouré de milliers de personnes ajoute à la peine. Selon elle, personne n’est seul dans la mort, puisque les vivants pensent encore à nous. Ce point de vue est très présent dans le film, notamment avec le personnage de Mimi, patiente d’Elsa en palliatif, qu'interprète Anne Benoît (Je vous souhaite d’être follement aimée). Pour les scénaristes, elle était une évidence. Pour interpréter au mieux le lien entre son personnage et ses patients, Magalie Lépine-Blondeau a passé beaucoup de temps dans des services de soins palliatifs, et s'est dit rassurée de voir leur accompagnement et les conditions d’hospitalisation. Le personnage d'Oscar est quant à lui compositeur d’électro. Les scénaristes expliquent ce choix, à la fois pour le côté artistique et parce que cette musique peut être travaillée seul devant son ordinateur. Une mère est d’ailleurs venue voir Alice Vial à la fin d’une projection pour parler de son fils, qui fait ce métier, et lui demander quand est-ce qu’il serait trop tard pour ça et s’il devrait renoncer. La réalisatrice lui a alors répondu qu’il n’était jamais trop tard, fidèle au propos du film. Le tournage a été beaucoup bercé par la musique, les comédiens racontent en avoir souvent écouté sur le plateau pour « se brancher sur la même fréquence », confiait Magalie Lépine-Blondeau.
L’Âme idéale n’a pas peur de mélanger les genres, entre comédie, drame, romance et fantastique. Abordant des sujets difficiles avec légèreté sans pour autant les minimiser, il permet à la fois de s’évader et de se questionner. Le film sortira en salles ce 17 décembre.