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Migrations et climat, comment habiter notre monde ?

par Véronique Giraud
Des habitants de Carti Sugdupu, en proie à la surpopulation et gravement menacée par la montée des eaux ont quitté leur île pour s'installer à Nuevo Carti (2024). Cliché de Martin Bernetti.
Des habitants de Carti Sugdupu, en proie à la surpopulation et gravement menacée par la montée des eaux ont quitté leur île pour s'installer à Nuevo Carti (2024). Cliché de Martin Bernetti.
Les migrations ont suscité l'engagement de reporters qui, à l'instar de Dorothea Lange, ont documenté les conséquences écologiques et sociales pour les fermiers aux États-Unis (à gauche). Les raisins de la colère, livre de Steinbeck, a inspiré le cinéaste John Foe-rd en 1940 (à droite). ©Rivaud-NAJA
Les migrations ont suscité l'engagement de reporters qui, à l'instar de Dorothea Lange, ont documenté les conséquences écologiques et sociales pour les fermiers aux États-Unis (à gauche). Les raisins de la colère, livre de Steinbeck, a inspiré le cinéaste John Foe-rd en 1940 (à droite). ©Rivaud-NAJA
Parmi les multiples conséquences du réchauffement climatique, la disparition en cours des récifs coralliens a inspiré à deux sœurs et artistes, Margaret et Christine Werthein, The Deep Island from Baden Baden Satellite Reef. Originaires d'Australie et vivant en Californie, elles ont imaginé une œuvre collaborative (plus de 20 000 personnes de 50 villes et pays différents) et évolutive, réalisée au crochet. Les couleurs chatoyantes contrastent avec le blanchissement des coraux, signe de dépérissement lié à l'augementation de la température de l'eau. ©Rivaud-NAJA
Parmi les multiples conséquences du réchauffement climatique, la disparition en cours des récifs coralliens a inspiré à deux sœurs et artistes, Margaret et Christine Werthein, The Deep Island from Baden Baden Satellite Reef. Originaires d'Australie et vivant en Californie, elles ont imaginé une œuvre collaborative (plus de 20 000 personnes de 50 villes et pays différents) et évolutive, réalisée au crochet. Les couleurs chatoyantes contrastent avec le blanchissement des coraux, signe de dépérissement lié à l'augementation de la température de l'eau. ©Rivaud-NAJA
Marée rouge (2014), série de Ghazel peinte sur carte du monde en papier. L'artiste, qui a quitté l'Iran pour venir étudier en France, s'est longtemps qualifiée de
Marée rouge (2014), série de Ghazel peinte sur carte du monde en papier. L'artiste, qui a quitté l'Iran pour venir étudier en France, s'est longtemps qualifiée de "nomade hybride". Sa série rappelle de façon métaphorique les bouleversements provoqués par l'homme. ©Rivaud-NAJA
Lucy Orta explique l'enjeu de l'Antarctica World Passport qu'elle tient dans sa main. © Rivaud-NAJA
Lucy Orta explique l'enjeu de l'Antarctica World Passport qu'elle tient dans sa main. © Rivaud-NAJA
L'installation du duo Lucy + Jorge Orta dans l'Antarctique est composé de cinquante tentes igloo recouvertes de drapeaux et de vêtements du monde entier, posé sur la glace. Leur Antarctic Village – No Borders agit comme un plaidoyer pour l’accueil des migrants et la circulation sans frontières des hommes. © Rivaud-NAJA
L'installation du duo Lucy + Jorge Orta dans l'Antarctique est composé de cinquante tentes igloo recouvertes de drapeaux et de vêtements du monde entier, posé sur la glace. Leur Antarctic Village – No Borders agit comme un plaidoyer pour l’accueil des migrants et la circulation sans frontières des hommes. © Rivaud-NAJA
Dans la section L'esprit de l'eau, deux photographies de Nyaba Léon Ouedraogo. À gauche, Le pêcheur (2022). À droite, Offrande (2022). ©Rivaud-NAJA
Dans la section L'esprit de l'eau, deux photographies de Nyaba Léon Ouedraogo. À gauche, Le pêcheur (2022). À droite, Offrande (2022). ©Rivaud-NAJA
Dans l'exposition, les circulations migratoires et les changements climatiques sont cartographiés. Ici, La fresque de l'océan permet de mieux comprendre le cycle de l'eau. ©Rivaud-NAJA
Dans l'exposition, les circulations migratoires et les changements climatiques sont cartographiés. Ici, La fresque de l'océan permet de mieux comprendre le cycle de l'eau. ©Rivaud-NAJA
Storms #4 (2021), captation vidéo de l'artiste Davide Quayola, donne une forme nouvelle et captivante à la tradition du paysage marin. ©Rivaud-NAJA
Storms #4 (2021), captation vidéo de l'artiste Davide Quayola, donne une forme nouvelle et captivante à la tradition du paysage marin. ©Rivaud-NAJA
Un des espaces de l'aquarium tropical du Palais de la Porte dorée. ©Rivaud-NAJA
Un des espaces de l'aquarium tropical du Palais de la Porte dorée. ©Rivaud-NAJA
Spécimen de mangroves observées dans l'aquarium du Palais de la Porte dorée. ©Rivaud-NAJA
Spécimen de mangroves observées dans l'aquarium du Palais de la Porte dorée. ©Rivaud-NAJA
Hors-Champs Société Publié le 27/11/2025
La question ramène aux multiples catastrophes géopolitiques et climatiques qui s'abattent sur notre planète. Au sein du Palais de la porte dorée, scientifiques et artistes s'en emparent en reliant pour la première fois la faune et la flore de l'aquarium tropical aux espaces du musée de l'histoire de l'immigration. Les mouvements permanents des migrations et du climat échappent ici au brouhaha d'informations contradictoires, pour confronter le visiteur à des réalités méconnues.

Les migrations et le climat sont deux sujets malmenés actuellement, comme le rappelle en préambule la directrice générale de La Porte dorée, Constance Rivière, qui précise que le lieu qui abrite le musée national de l’immigration a l’habitude de traiter les sujets qui fâchent. Mais que sait-on des migrations ? Que sait-on de l’histoire du climat et ses conséquences sur l’actuel dérèglement climatique ? Difficile d’avoir un avis serein tant les migrations sont présentées comme « le problème » et le combat de nombreux États, et tant le sujet du climat dans son dérèglement est nié, voire méprisé, par les sceptiques au pouvoir. Les scientifiques et les artistes invités proposent d'apporter leur éclairage, rationel et sensible, avec des études et des œuvres formant le parcours de Migrations et climat. Une exposition qui invite à prendre une distance avec le brouhaha ininterrompu des avis et autres parti pris qui invitent à détourner les regards et les esprits.

 

Une méconnaissance du phénomène. Prendre une distance donc avec des observations scientifiques sourcées, mais aussi avec des productions d’artistes qui accompagnent l’émerveillement que suscite la nature. Tous vont à rebours de l’accélération des informations et des images pour imposer le temps long de leur pratique et de leurs réflexions. Et de témoignages édifiants, à l’instar de celui d’exilés, de réfugiés climatiques, de victimes d'inondations. L’exposition apprend et désapprend. La préparation de l'exposition s’est appuyée sur les résultats affligeants d’une grande enquête nationale menée par Occurrence – Groupe Ifop sur la perception et la connaissance des migrations liées aux changements climatiques. Les réponses obtenues mettent en lumière une méconnaissance profonde du phénomène, malgré une conscience croissante de son ampleur et de ses conséquences.

 

L’ADN même de l’institution sert le propos de l’exposition, le palais de la porte dorée abrite en effet à la fois un immense aquarium en sous-sol, et le musée national de l’immigration à l’étage. À l’étage le traitement des circulations humaines et ce qu’elles ont inspiré aux artistes, au sous-sol l’observation des migrations du vivant… Pour la première, fois les deux espaces n’en forment qu’un. Après le beau succès de Banlieues chéries, l’exposition Migrations et climat prend à bras le corps ces thématiques, et devrait rassembler les publics, les habitués du musée, ceux qu’attirent les espaces de l’aquarium qui ont en commun un bien commun essentiel, l’eau. Les productions artistiques, qui font écho à l’exposition, montrent que les inquiétudes climatiques ont toujours frappé l’homme. L’arche de Noë, le naufrage, la famine, le déluge, sont des sujets qui ont traversé et traversent toujours l’histoire de l’art. Accrochés côte à côte, les tableaux d'un anonyme du XVIIIe et de Brueghel l’Ancien témoignent de la dualité de l’homme, sa crainte du déluge et son désir d'harmonie avec le vivant sous toutes ses formes.

 

L'utopie d'une circulation sans frontières. L’activisme n’est jamais loin quand il s’agit de ces thématiques. L’utopie sans frontières à laquelle œuvrent depuis longtemps les artistes Lucy+Jorge Orta (nés en 1966 et 1953), a pour objet symbolique l’Antarctique, un territoire de recherches dont la gouvernance interétatique est unique. S’inspirant de ce modèle de coopération entre les nations dans un lieu inhospitalier, les deux artistes ont conçu une installation haute en couleurs avec l’aide des scientifiques de la base internationale Marambio. Composé de cinquante tentes igloo recouvertes de drapeaux et de vêtements du monde entier, posé sur la glace, leur Antarctic Village – No Borders agit comme un plaidoyer pour l’accueil des migrants et la circulation sans frontières des hommes. Au musée de l’immigration, le duo a installé un bureau de leur Antarctica World Passport, un passeport de citoyen du monde en solidarité avec l’Antarctique. Mis à la disposition des visiteurs, qui peuvent y imprimer des tampons, ce document symbolique reprend les mécanismes de circulation d’un pays à un autre et donnent une réalité troublante à ce que pourrait être la circulation sans frontières dans un pays monde.

 

Ce que les œuvres racontent. Les migrations des papillons, la fragilité des coraux, la disparition du caribou, la montée des eaux au Soudan, l’école au Bangladesh sont quelques-unes des réalités que des photographies documentent, que des œuvres textiles, des peintures, des installations chatoyantes, des objets de protection, racontent ou content. Certaines œuvres ont été créées avec l’intention de leurs auteurs et autrices d’éveiller les consciences, ainsi les images de la montée des océans que Nick Brandt a fabriquées en 2023 en fondant plusieurs réalités, qui amènent à poser les questions : où habiter demain ? Rester ou partir ? Abandonner ou reconstruire ?

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