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Mot de passe oublié ?L'ouverture de l'édition 2016 de Montpellier Danse devrait faire date. Non seulement elle est programmée loin de l’habituel centre historique de la ville, mais c’est avec un spectacle de danse contemporaine sur patins à glace. C'est donc à la patinoire Vegapolis du centre commercial Odysseum que les festivaliers, bien couverts, se rendront le 23 juin pour assister au spectacle des danseurs de la compagnie montréalaise Le patin libre. Suivront quatre représentations de leur création « Vertical Influences ». De quoi donner un coup de jeune à une discipline jugée plutôt désuète et en manque d’invention, avec un spectacle où même les lumières jouent avec la glace. Un spectacle rafraichissant, rappelons que la température intérieure est maintenue à 15°.
D’une rive à l’autre de la Méditerranée. Les artistes méditerranéens, très nombreux dans cette édition, viennent de lieux où l’actualité est brûlante, où la liberté de créer est souvent menacée. Leur présence induit une question qui parcourt cette édition, celle du rapport de l’artiste au pouvoir, religieux ou politique, à travers une myriade de rendez-vous. Ceux des créations bien sûr, mais aussi des rencontres et des projections organisées à l’Agora.
Tous ces artistes font sans cesse les allers retours d’une rive à l’autre, s’installant parfois dans un autre pays, ou choisissant de rester. Parmi eux, le chorégraphe marocain Taoufiq Izeddiou qui a débuté dans la même compagnie que Bouchra Ouizgen et créé avec elle à Marrakech le festival de danse En marche et Raddhouane El Meddheb, tunisien de nationalité française, qui a choisi de vivre à Paris, comme Nacera Belaza. Très attachée à l’Algérie, cette dernière explore les voies d’une transe toute contemporaine et convoque, avec sa pièce Sur le fil, les limites de l’équilibre. La jeune chorégraphe tunisienne Oumaima Manai se joue du temps avec Vivre le temps mort, une pièce pour six danseuses. Le Liban est présent avec Dania Amoud, Israël avec Sharon Eyal. Israélien lui aussi, mais vivant à Montpellier, Emmanuel Gat vient en habitué du festival.
Le chorégraphe Dimitri Papaioannou évoque les conditions de production pour les artistes en Grève, un pays d’Europe où l'argent public manque. La situation ne l’empêche pas d'aimer créer des œuvres gigantesques. L'opéra Corum l'a inspiré pour imaginer Still life, une œuvre d’images, très empreinte du cinéma en noir et blanc - rappelant qu’il fut un moment l’assistant de Bob Wilson.
L’Iran, de la danse au cinéma. L’Iran est représenté par Hooman Sharifi. Le chorégraphe vit désormais en Norvège où lui a été confiée la direction de Carte Blanche, la seconde plus grande compagnie nationale. Il vient à Montpellier pour exécuter un solo, accompagné d’un orchestre de musiciens traditionnels iraniens. Le jeune Iranien Sorour Darabi, qui a intégré en 2013 le Master Exerce de Mathilde Monnier à Montpellier, étudie aujourd’hui dans une école d’art de la banlieue parisienne. Il vient avec sa performance Farci.e, avec laquelle il interroge le genre.
La plupart des cinéastes iraniens vivent en Iran. La réalisatrice Mitra Farahani, elle, vit à Paris. Son film Fifi hurle de joie est un documentaire sur un peintre iranien, Bahman Mohassess, qui vivait exilé à Rome (il mourra au cours du tournage). Il fournit un poignant témoignage d’un artiste faisant face au pouvoir. Persécuté par la police du Shah, puis par celle des Ayatollahs, le peintre évoque son œuvre de façon symptomatique.
Des chorégraphes en empathie. Lia Rodrigues vient pour la première fois au festival. Après des études en danse classique à Rio et un passage en France dans la compagnie de Maguy Marin, la chorégraphe brésilienne incarne une nouvelle génération de créateurs d’Amérique du sud, dont les festivaliers avaient eu un aperçu l’an dernier avec le jeune argentin Luis Garay. Mêlant performance, arts plastiques et narration, leurs spectacles renouvellent radicalement les pratiques de la danse. Lancer un cri d’espoir est le titre de l'œuvre de cette jeune chorégraphe ayant choisi de travailler au plus près des favelas de Rio.
Robin Orlin est une habituée de Montpellier Danse. Si elle vit aujourd’hui à Berlin, sa création ne quitte jamais son Afrique du Sud natale. De ce pays marqué par l’Apartheid, elle ne cesse d’évoquer les richesses et les déséquilibres. Son nouveau spectacle, conçu avec Albert Obokwe Khoza, les évoque tout comme ceux qui touchent le monde, imposant au final une forme de dissidence nécessaire.
Né au Burkina Faso, le chorégraphe Salia Sanou vit à Montpellier. Pour cette édition, il montre l’achèvement d’un travail dans les camps de réfugiés, qu’il a commencé en 2014. Un sujet lui aussi brûlant d’actualité.
Les habitués du festival. Aux côtés de ces artistes qui fleurent bon le monde d’aujourd’hui, il y a les habitués. Christian Rizzo, qui dirige le centre chorégraphique de Montpellier, achève sa trilogie dans laquelle il met en regard la technique de la danse contemporaine avec les gestuelles dansées anonymes. Pierre Rigal créera une comédie musicale très expérimentale Même, dans la cour de l’Agora. L’Espagnol Andres Marin revient au festival avec un projet conçu avec deux danseurs de hip hop de la compagnie de Kader Attou, le directeur du centre chorégraphique de La Rochelle. Ce dernier signe la mise en scène d'un spectacle très graphique, où la danse mêle flamenco et hip hop devant un grand orchestre de musique traditionnelle du Rajahstan. Emmanuel Gat parcourra les villes de la métropole pour lesquelles il a créé Le rouge et le noir. Sur une idée du festival, une dizaine d’auteurs, cinéastes, chorégraphes, danseurs, metteurs en scène se sont rassemblés autour de Maguy Marin, pour imaginer chacun une séquence. Ces pièces, mises bout à bout, composent l'œuvre Passion(s) qui, pendant près de trois heures, rassemble vingt acteurs et cinq techniciens sur la scène du théâtre des 13 Vents.
Festival Montpellier Danse, du 23 juin au 9 juillet - Agora, cité internationale de la danse, 18 rue Sainte Ursule, Montpellier. Réservations /Renseignements : 0 800 600 740 (N°vert). montpellierdanse.com