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Mot de passe oublié ?Pop-Folk. Dans ses locaux rue de Lancry, dans le 10e arrondissement de Paris, Jean-Charles Dufeu entasse les albums aux couvertures graphiques, soigneusement plastifiées. « Vous avez une platine vinyle, chez vous ? » Sa main retombe, déçue. « Vous avez un lecteur CD, au moins ? De moins en moins de gens en ont. Quand on fait ce métier, c'est toujours un peu difficile d'entendre ça ».
Le label Microcultures a l'âme utopique. Convaincue d'un monde où les accords de folk biens sentis, les trouvailles pop indé, les grains de voix se baladant entre mélancolie joyeuse et textes introspectifs, peuvent s'enregistrer avec les moyens du bord et rejoindre nos étagères de disques précieux. Jean-Charles Dufeu y croit tellement dur qu'il a plaqué, en 2010, son emploi bien établi chez la multinationale Amazon.
Depuis, le fondateur de Microcultures a produit et distribué en France, grâce au financement participatif, une vingtaine d'artistes coup de cœur glanés au fil d'écoutes minutieuses, de rencontres à l'étranger et de surprises musicales. La plateforme de crowdfunding de la maison, ouverte à tous, enregistre de son côté l'aboutissement de soixante albums depuis son lancement en septembre 2014.
Tête chercheuse. « Aujourd'hui, enregistrer un album, même le distribuer, c'est devenu plus accessible. C'est le bon côté de l'industrie musicale. Le moins bon, c'est qu'il n'y a plus de filtres. Le premier filtre, au final, se fait à l'écoute sur internet. Il y a énormément de choses. » Pour l'amateur de musique, difficile de s'y retrouver ou de tout suivre. Pour l'artiste, difficile d'exister. Le label chérit donc ses découvertes, organise des tournées, intervient, conseille et fait fonctionner son réseau dans toute la chaine de distribution, de l'illustration de la pochette de disque au merchandising. Les américains Soltero et Phantom Buffalo font partie des piliers du label, présents dès les premières heures. « Même s'ils ont du succès dans le milieu indé, s'ils ont pas mal de très bonnes critiques, ils ont abandonné l'idée de vivre de la musique », raconte Jean-Charles Dufeu. Raison de plus pour les soutenir. « J'aime travailler avec des personnes qui, quelques soient le nombre d'albums qu'ils vendent, écriront les mêmes chansons. C'est une question de maturité artistique ».
Premiers salaires. Jean-Charles Dufeu n'est ni « maso », ni « milliardaire », affirme-t-il. A l'heure où les titres sont de plus en plus écoutés, appréciés, mais de moins en moins achetés, le musicophile reste - pourtant - intrinsèquement attaché à l'objet. Après les vaches maigres de ses années estudiantine, il profite de l'abondance de ses premiers salaires pour produire, entièrement sur ses deniers personnels, le premier album français de Soltero, sobrement baptisé 1943 (à découvrir dans La Boîte). « A l'époque j'écrivais pour le magazine musical Pop News. J'avais vraiment accroché sur son dernier album, que je trouvais super bien. J'étais surpris qu'un artiste comme ça soit complètement inconnu en France. Lui n'avait pas d'autres ambitions que de sortir uniquement sur internet. Je trouvais ça un peu dommage ». Jean-Charles Dufeu finance la sortie de l'album et finit par se prendre au jeu. Il organise une « petite promo », une tournée. Sa vocation est née.
Crowdfunding. Microcultures vise désormais grand. Le site, via sa plateforme de financement participatif, propose d’accueillir les projets venus de tous les genres musicaux et offre ses services à la carte pour une éventuelle production d'album, qu'il soit physique ou numérique. Le label, quant à lui, compte faire rentrer une centaine de nouveaux venus dans les rangs de ses petits protégés, en 2015.
Ecouter les artistes de Microcultures:
Soltero
Shiv Hurrah