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Dix-huit rendez-vous avec Les arts de l’Islam

par Véronique Giraud
Panneau de revêtement à la Joute poétique © Musée du Louvre / Raphaël Chipault 2012
Panneau de revêtement à la Joute poétique © Musée du Louvre / Raphaël Chipault 2012
Arts visuels Arts plastiques Publié le 12/12/2021
Face à l’atmosphère délétère qui touche aux cultures étrangères, le ministère de la Culture a confié au musée du Louvre la construction d'un événement rare : " Les arts de l’Islam, un passé pour un présent ". Dans dix-huit villes de France, des expositions sont organisées jusqu’au 27 mars.

« La meilleure manière d’aborder des œuvres d’art islamique est de raconter leurs histoires » estime Yannick Lintz, commissaire en charge de chapeauter les dix-huit expositions des dix-huit villes françaises pour un événement plutôt inédit : montrer partout en France les plus belles pièces de la culture islamique que renferment leurs fonds.

Parler d’Islam actuellement en France n’est pas neutre. Les violentes charges que se permettent nombre de politiques à l’égard d’une culture riche de tant de diversités dans le monde ne peuvent laisser indifférents des spécialistes qui voient chaque jour leur travail traité de si violente façon. À la suite de l’assassinat de Samuel Paty, mission a été confiée à la commissaire générale, par le Premier ministre Jean Castex, de parler de l’Islam autrement que par le prisme de la sécurité et du terrorisme.

 

À la rencontre des jeunes. « Apprendre qu’une œuvre en cristal de roche qui se trouve dans une église française aujourd’hui, a été sculptée au Caire vers le XIe siècle et que les artisans musulmans sont allés chercher le matériau précieux à Madagascar, c’est une manière de pénétrer dans la fascination de ces objets voyageurs ! » poursuit Yannick Lintz dont la compétence est largement reconnue. Conservatrice générale du patrimoine, elle s’est vu confier la direction du département des arts de l’Islam du musée du Louvre qui a ouvert ses portes au public en 2012. En racontant une histoire à partir d’une œuvre, la commissaire dévoile sa cible principale : le jeune public. La lettre de mission stipule en effet l’idée de « construire un projet de mise en valeur des arts de l’Islam qui soit particulièrement tourné vers la jeunesse ».

Les objets d’art islamique qui ont été donnés à la France et qui sont conservés dans ses musées ont été réalisés en Iran, en Turquie, en Afghanistan, en Inde… Des pays dont l’actualité faites de guerres et de conflits à travers les rivalités économiques et territoriales, fait oublier la richesse de leurs arts.

Alors que l’actualité fait place à la haine d’une minorité bruyante, ces rivalités sont souvent ce que retiennent les nouvelles générations, c’est aussi ce qui les sépare de l’autre. La beauté pourrait-elle renverser la tendance ? Une exposition des beautés d’ailleurs, gages de bonne relation avec un autre pays, pourrait-elle aiguiser l’appétit de mieux connaître et d’être fier d’un riche passé ?

 

La riche collection du Louvre. Pour répondre à l’ambition d’un tel message qui s’adresse à un public jeune, large et de cultures diverses, il faut être direct et concis. D’où la nécessité d’éviter une profusion qui pourrait écraser par son érudition en adoptant un langage muséal clair, capable de toucher les plus jeunes. C’est ce qui explique la décision prise de proposer à chaque ville de choisir trois objets seulement parmi les collections du Louvre. Objets qui viennent s’ajouter à quelques chefs d’œuvre des fonds locaux et régionaux.

Dur choix pour des conservateurs et conservatrices, directeurs et directrices du patrimoine, qui ont à leur disposition des milliers de pièces, toutes plus belles les unes que les autres. Le Louvre possède des pièces de l’art islamique depuis sa création en 1793. « Parmi nos pièces les plus prestigieuses, se trouvent des œuvres qui appartenaient aux collections royales, comme le fameux Trésor de Saint Denis » explique Yannick Lintz. « Ces objets d’Orient fascinaient les rois de France comme Louis XIV mais aussi plus loin dans le temps François Ier, qui entretenait des relations avec Soliman le Magnifique ».

Le Louvre possède ainsi environ 20 000 objets, dont quelques-uns sont exposés dans la Cour Visconti du musée.

 

Dix-huit artistes contemporains. Dix-huit villes affichent donc depuis le 20 novembre, dans un musée, une médiathèque, une bibliothèque, un espace culturel, une exposition avec un même titre, Les arts de l’islam, et un sous-titre, Un passé pour un présent, celui-ci indiquant que s’arrêter sur un passé, lointain, peut construire la mémoire collective d’aujourd’hui. S’arrêter sur aujourd’hui aussi, puisque chaque exposition comptera une œuvre d’un artiste contemporain d’un pays du monde islamique, mettant en regard sa vision du monde actuel.

Difficile de présager de l’accueil des plus jeunes, dont la famille est originaire de tel pays, ou qui y sont nés et en sont partis très tôt. « Je vois la fierté des jeunes d’origine maghrébine à retrouver au département des arts de l’Islam du Louvre des objets marocains, algériens ou tunisiens. Que ces œuvres représentent un magnifique plateau en métal doré pour le thé ou un objet de mosquée, ils sont fiers, parce qu’ils s’y reconnaissent d’une certaine manière. Leur fierté n’est pas la religion dans ce cas, observe la conservatrice, mais le sentiment de posséder les codes culturels pour comprendre l’œuvre. La vraie découverte exotique pour ces jeunes, c’est plutôt de découvrir l’art iranien ou égyptien ou turc qui eux ne lui parlent pas ».

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