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Mot de passe oublié ?Le projet du renouveau culturel de Lisbonne est né depuis le site de son ancienne centrale électrique. Construite en 1909 sur la rive du Tage, elle est devenue musée de l’électricité dans les années 80, l’un des musées les plus visités du Portugal. À l’automne 2016, le projet muséal a trouvé un nouveau ressort avec l’édification d’un bâtiment audacieux conçu par le cabinet d’architecture londonien Amanda Leveete. Les deux sites sont proches mais la géométrie fonctionnelle de Central Tejo, la centrale enveloppée de briques rouges et blanches, contraste fortement avec les blanches courbes organiques du nouveau MAAT (Musée d'art, architecture et technologie). Dans le quartier Belem, tous deux regardent vers le fleuve, tels deux paquebots immobiles. Seule une passerelle piétonne les relie au vieux Lisbonne. Immaculée elle aussi, ponctuée d’une succession de longues marches, une esplanade mène au nouveau musée qui propose chaque été une grande exposition.
Un nouveau paysage pour Belem. On peut se contenter de descendre doucement vers le bâtiment, et parvenir à la large promenade bordant le fleuve où piétons et vélos se croisent en silence. On peut aussi, en préambule de la visite, se rendre au sommet de l'étrange colline façonnée par l’homme. C’est qu’en portant attention à l’horizon, des silhouettes apparaissent dans le bleu du ciel. En s’en approchant, on réalise qu’il s’agit de grands chiens violets et blanc. Au milieu de la meute, un géant blanc à la longue chevelure. Cette installation, que l’on doit à l’artiste français Xavier Vailhan, invité par le musée en cet été 2019, intrigue par sa grande échelle et semble porter une histoire. Elle donne vie à l’immense toit-terrasse du MAAT depuis lequel se laisse admirer le coucher du soleil sur le Tage et le Cristo Rei. Intitulée Romy and the Dogs, l’œuvre insuffle un mouvement qui fait écho à celui des formes architecturales, tandis que les regards des visiteurs sont eux aussi attirés vers le fleuve.
L'évidence du lien entre art et architecture. Une fois dans le bâtiment, il faut s'accoutumer à la pénombre qui entoure les œuvres de Jesper Just jalonnant les espaces du musée d’art et d’architecture. Ceux-ci sont vite oubliés tant l’attention est happée par la luminosité provenant des installations audiovisuelles, par les sons qui s’en échappent, et par les images qui forcent l’attention. La perception spatiale, brouillée par un système complexe de passerelles métalliques, offre différents points de vue des projections, loin des écrans, les surplombant, ou obligeant le visiteur à les longer. Le visiteur, en premier lieu spectateur, devient acteur à son insu, par le regard d’autres visiteurs qui voient apparaître leur ombre sur l’une des projections de l'installation intitulée Servitudes – circuits (interpassivités). Immergé dans la musique qu’une enfant joue au piano et dont les mains sont filmées, dans le visage d’une femme à sa fenêtre, le visiteur perçoit différentes perspectives qui se succèdent, se chevauchent, font perdre les repères. Cette expérience immersive, très maîtrisée, produit l'évidence du lien entre art et architecture, donne la mesure aussi de la puissance des images et des sons à la fois sur notre environnement et sur notre perception de l’espace. Une partie de l’installation, intitulée Circuits, avait été présentée en 2015 au Palais de Tokyo à Paris. Le second volet, Servitudes, a été conçu spécifiquement pour le MAAT. L’ensemble est présenté jusqu’au 2 septembre 2019.
Des perspectives inédites. Le bâtiment du MAAT, lieu dédié à l’architecture, à l’art, à la technologie, épouse le propos du musée. Les sinuosités de ses parois procurent au visiteur des perspectives inédites, appuyées par une programmation artistique qui privilégie la performance, l’art vidéo, le cinéma expérimental et la photographie. La nouvelle scène portugaise y côtoie les artistes internationaux.