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Avignon Off : « Soudain, chutes et envols », fragments d’adolescents amoureux

par Véronique Giraud
Ambre Dubrulle, Inès Do Nascimento et Constance Guiouillier, magnifiques incarnations de Soudain, chutes et envols, pièce écrite par Marie Dilasser et mise en scène par Laurent Vacher. © Christophe Raynaud de Lage.
Ambre Dubrulle, Inès Do Nascimento et Constance Guiouillier, magnifiques incarnations de Soudain, chutes et envols, pièce écrite par Marie Dilasser et mise en scène par Laurent Vacher. © Christophe Raynaud de Lage.
Arts vivants Théâtre Publié le 26/07/2022
Dans le parc du Château Saint-Chamand à Avignon,  trois adolescents jouent leur amour, d'un fragment de vie à un autre. Avec "Soudain, chutes et envols", Laurent Vacher touche une nouvelle fois à l'impensé avec la plume de Marie Dilasser et les confidences de très jeunes gens.

Parlez-moi d’amour ! C’est ce que Laurent Vacher a demandé à des adolescentes et à des adolescents, âgés de 8 à 14 ans. Imprégnant ses questions de l’ouvrage Fragments d’un discours amoureux (1977) de Roland Barthes, accompagné de l’autrice Marie Dilasser, le metteur en scène a recueilli leurs expressions, leurs attitudes, leurs réflexions. Avec cette expérience et de ces nouveaux fragments, Laurent Vacher a travaillé avec les apprentis comédiens de l’ESCA. Au sein du studio théâtre d’Asnières chaque fragment a été exprimé par leurs corps pendant un mois. Le texte de l’écrivaine, issu à la fois des paroles adolescentes et de son acuité lors des rencontres, est venu ensuite se glisser en phrases courtes et percutantes dans leurs bouches et a inspiré sur scène d’autres gestes, de nouveaux rapports à l’autre.

 

Rendez-vous dans un parc. On imagine aisément la gêne et les non-dits des interviewés. Leurs réactions, rires, silences, moqueries, n’ont pas été évacués. Ils ont été transformés en dialogues sous la plume sans fard de Marie Dilasser. La pièce donne rendez-vous dans un parc, c’est l’endroit le plus sûr où se retrouver si l’on ne veut pas être vu ou entendu. Pour le OFF d’Avignon, c’est dans le parc du château qu’elle se joue. Entre deux lignes de bancs où est assis le public, les trois comédiennes (toutes trois magnifiques) vont jouer à cache-cache, s’interpeller, se séduire, se rejeter, se dire des mots parfois très durs ou très amoureux. Trop même, c’est ce que reproche l’aimée qui ne cherchait qu’à se tenir à distance du monde et se sent menacée face à un amoureux prêt à tout pour elle. La volonté de liberté et d’émancipation domine, à l’égard des parents et de ses congénères mais aussi à l’égard de celui qui vous déclare trop fort son amour. Attirance et répulsion, séduction et indifférence, garçon-fille-garçon, souffrance de l’abandon et de la perte de soi donnent lieu à des jeux de rôle tour à tour cruels et touchants. L’attente de l’autre est longue dans le parc, les menaces planent sur un amour éternel et exclusif. Les preuves d’amour sont réclamées, faire le mur et s’enfuir. Le rêve est aussi présent, les stratagèmes les plus fumeux ont cours dans l’esprit adolescent et ils sont délicieusement accompagnés ici par des moments de magie élaborés par un vrai magicien.

Les mots de Marie Dilasser tapent fort et juste. Tout ce qui est pressenti de ce que disent, pensent et taisent les adolescents en matière d’affect percute. La relation entretenue entre amoureux et aimé est sans parade, c’est dit, c’est jeté, rejeté. Ce ton, ces mots, ces fragments de vies disent la solitude d’aimer.

 

Soudain, chutes et envols. Texte Marie Dilasser. Mise en scène Laurent Vacher. Avec Ambre Dubrulle, Constance Guiouillier, Inès Do Nascimento. Effets magiques Benoit Dattez. Programmé par La Manufacture, Du 7 au 27 juillet, relâches 13 et 20 juillet, Château - Plateau extérieur.

 

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