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Ceija Stojka hante la maison rouge de la mémoire tsigane

par Véronique Giraud
Ceija Stocjka, Déportation dans un camp d'extermination, 1994. Huile sur carton. ©Giraud/NAJA
Ceija Stocjka, Déportation dans un camp d'extermination, 1994. Huile sur carton. ©Giraud/NAJA
Portrait de Ceija Stojka. DR
Portrait de Ceija Stojka. DR
Ceija Stojka, sans titre, sans date, acrylique sur carton.©Giraud/NAJA
Ceija Stojka, sans titre, sans date, acrylique sur carton.©Giraud/NAJA
En regard de cette installation, ce s mots de Ceija Stojka :
En regard de cette installation, ce s mots de Ceija Stojka : "Qui a survécu à Bergen-Belsen n'a réussi que parce que Dieu lui a donné la force de tenir. Parce que Marie lui a donné de la chaleur et lui a ôté la faim. C'est comme ça qu'on pouvait supporter sans se plaindre. Et où est-ce que tu aurais pu te plaindre ?"
Ceija Stojka
Ceija Stojka
Ceija Stocka, sans titre 2003, Craie et acrylique sur papier. ©Giraud/NAJA
Ceija Stocka, sans titre 2003, Craie et acrylique sur papier. ©Giraud/NAJA
© ceija stojka
© ceija stojka
Arts visuels Arts plastiques Publié le 26/02/2018
En ce printemps 2018, à la maison rouge, le public parisien pourra se confronter à la production obstinée de l’artiste rom Ceija Stojka, décédée en 2013. Ses œuvres mettent en parallèle le ferment de sa culture tsigane et la terreur subie par sa communauté que les nazis voulaient exterminer. Avec la candeur du regard intact de l’enfant que Ceija était lors des événements.

« Tout nous était interdit dans cette société, sauf de mourir. Et c’était à nous de savoir ce qu’on allait en faire de ce peu de vie, si on allait mourir ou lutter ». Ces mots écrits par l’artiste rom Ceija Stojka, on les découvre sur les murs de la Maison Rouge parmi d’autres phrases ou poèmes extraits de son recueil Auschwitz est mon manteau et autres chants tsiganes. Mis en regard de ses peintures et dessins, que le lieu présente du 23 février au 20 mai avant de fermer ses portes. Toutes ces œuvres auraient pu ne jamais être vues du grand public si, à la mort de sa mère, Hodja Stojka n’avait fait appel à quelques curieux. Parmi eux, Antoine de Galbert, propriétaire de la Maison rouge et de la fondation qui porte son nom, et Xavier Marchand, homme de théâtre, commissaire de l’exposition consacrée à Ceija Stojka. C’est que Xavier Marchand œuvre depuis longtemps à Marseille pour donner une visibilité à la culture des communautés qui vivent dans la métropole française. Il est d’ailleurs à l’initiative de la première exposition des tableaux de Ceija Stojka à la Friche la Belle de Mai l’an dernier.

En ce printemps 2018, c’est à Paris que le public pourra faire face aux travail obstiné de l’artiste autodidacte pour exprimer les images de sa culture et de la terreur subie par sa communauté vouée au génocide par les nazis. Les œuvres sélectionnées expriment tout cela avec la candeur du regard de l’enfant que Ceija était lors des événements en Autriche, son pays natal, au cours de la seconde guerre mondiale. Un autre pan de sa production révèle le bonheur de vivre parmi les siens, dans la nature fleurie, près des roulottes du voyage. Mais ce que ne disent pas ces œuvres dans leur pudeur, c’est ce qui reste de douleur et de tristesse derrière le sourire imperturbable de celle à qui on a volé l’enfance.

 

Un film deKarin Berger. Ces détails de « vie » au camp d’extermination de Bergen-Belsen, elle a pu les confier à la fin de son existence à Karin Berger, rencontrée en 1986. L’universitaire, devenue son amie au cours de presque trente années d’entretiens, lui a consacré deux livres et un film sur sa mémoire d’Auschwitz. Elle a recueilli en 2005 ses souvenirs de Bergen-Belsen et en a réalisé un second film. Projeté le temps de l’exposition, Unter den Brettern hellgrünes Gras (L'herbe verte repousse toujours) éclaire mieux que des mots la survivance d’un enfant et de sa mère dont la seule chance était d’aimer la vie et l’humanité, et de savoir survivre au dénuement le plus complet. Resurgit le souvenir du seul arbre qui, au printemps, apporta ses feuilles et sa sève pour nourriture à la jeune Rom, permettant ainsi de la sauver.

Ce n'est que sur le tard, en 1988, que Ceija Stocka commence à peindre, défendant une culture tant méconnue du reste du monde. Ses tableaux colorés content les jours heureux, la vénération pour la madone, éblouit de ses jaunes l'attention de son peuple pour la fleur de tournesol. De ses yeux pétillants de vie, de son doux sourire, de ses belles anecdotes, elle nous fait entrer d’emblée dans un monde qui entremêle contes et une solidarité bien réelle.

 

Ceija Stojka, une artiste rom dans le siècle, exposition organisée à la maison rouge, 10 boulevard de la Bastille à Paris (12e) du 23 février au 20 mai 2018.

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