espace abonné Mot de passe oublié ?

Vous n'avez pas de compte ? Enregistrez-vous

Mot de passe oublié ?
ACCUEIL > Oeuvre > Circulation (s) 2021 : Elliot Verdier, le Liberia en mémoires

Circulation (s) 2021 : Elliot Verdier, le Liberia en mémoires

par Élisabeth Pan
Adama et sa mère Helena, Westpoint. © Elliot Verdier
Adama et sa mère Helena, Westpoint. © Elliot Verdier
Arts visuels Photographie Publié le 18/03/2021
Le Libéria reste, à ce jour, silencieux quant à la violente guerre civile que le pays connut entre 1989 et 2003. Avec « Reaching for Dawn », le photographe Elliot Verdier se sert de la symbolique pour transmettre une douleur enfouie.

Disposées sur les murs bleu profond d'une salle étroite, un éclairage plongeant sur chacune, les photos d’Elliot Verdier ramènent d’emblée à un sombre contexte. « La série s’appelle Reaching for Dawn. Pour revenir à l’aube je voulais un mur bleu, celui d'avant les premières lueurs du soleil » explique-t-il. « Ça rappelle la nuit parce que c’est vraiment le moment où le traumatisme revient, on se retrouve seul avec soi-même ». On mesure alors l'importance de l’atmosphère dans l'œuvre.

La froideur de la scénographie contraste avec la douce portée, à la fois profonde et apaisante, des portraits en couleur et des paysages en noir et blanc. « Les images en noir et blanc sont des images de paysages, un peu contextuelles, souvent vides ou avec une présence énigmatique » commente le photographe. Les grands tirages sur les murs obligent à pénétrer dans l’univers du photographe, dont le travail à la chambre permet une netteté et un détail minutieux.

Les portraits, aux belles couleurs et aux matières très présentes, évoquent à la fois une perte et une nostalgie. « Certains portraits symbolisent que malgré le fait qu’ils vivent beaucoup en communauté, ils sont très seuls avec leurs traumatismes. » Sur un portrait, une autre présence, infime, coupée, montre un entourage mais peu de communication. Les personnes apparaissent alors telles qu’Elliot Verdier les voit, tristes, esseulées mais dignes, ce qui justifie la technique choisie. « Le travail à la chambre rend une certaine dignité aux personnes » confie-t-il, « Je me suis souvent posé la question de ma légitimité, mais je pense que les faire participer à l’image ça transmet quelque chose, ça leur donne une certaine stature. »

Au cours de son séjour au Liberia, Elliot Verdier a également recueilli des témoignages audios. Ils sont présentés à part des images, afin de renforcer la symbolique. « Il n’y a pas de légendes non plus, je ne voulais pas donner un niveau de lecture » argumente l'artiste. « Je veux que les gens se projettent avec les indices que j’ai laissés dans les images, les symboliques sont assez présentes. J’ai l’impression qu’on ressort plus touché d’une exposition qui n’explique avec exactitude pas ce qu’il s’est passé ». Le livre de sa série, qui sortira très prochainement, ne dispose d’ailleurs pas les témoignages à côté des portraits, mais sur des feuilles calques, et entre les paysages.

Un an après la fin de ce projet, le photographe admet avoir du mal à passer à autre chose. « Je pense que tous les photographes sont portés par les thématiques qui leur sont chères. Moi c’est clairement la mémoire, la transmission, l’intergénérationnel… »

Partager sur
Fermer