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Circulation(s) 2021 : Jesper Boot désacralise les images du pouvoir

par Élisabeth Pan
©Jesper BOOT « Power » 2019 festival circulation(s) 2021
©Jesper BOOT « Power » 2019 festival circulation(s) 2021
Arts visuels Photographie Publié le 17/03/2021
Conscient de l’impact de la photographie sur la politique, le Néerlandais Jesper Boot met en scène la normalité qui se cache derrière ces images du pouvoir. Sa série "Power" est présentée au festival Circulation(s).

Dans Power, Jesper Boot met en scène les membres de sa famille comme des personnalités politiques. « Je me suis demandé : J’ai ce projet intéressant, comment puis-je le rendre mien ? » commente-t-il. « J’ai alors utilisé mes parents pour reproduire ce que tout le monde voit dans les journaux à la télé, mais à ma façon. » Photographiés comme le sont aujourd'hui les figures du pouvoir, les parents de l’artiste paraissent à leur tour présenter des discours politiques épiques, informer les citoyens depuis le bureau présidentiel, et se retrouvent même confrontés à une affaire croustillante pour les tabloïdes.

 

Au-delà du cadre. Devant une photo de son père assis au bureau ovale de la Maison Blanche, le photographe explique : « Dans les journaux, on voit toujours le bon cadrage. » Jesper Boot choisit, lui, de montrer ce qui existe au-delà du cadre habituel, de la caméra des télévisions. Apparaît alors une pièce très banale par-delà le bien connu bureau présidentiel, fait de planches et imprimeries, avec des câbles au sol, une plante verte devant la baie vitrée. « C’est une photo très importante pour moi, » confie le photographe, « parce que c’est toujours scintillant, bien présenté et beau, mais c’est pour le décor, pour la façade. Or c’est juste une pièce. Tout le monde peut faire la même chose chez soi. »

Plus loin, se trouve une photo de sa mère, en plein speech, le visage déterminé. « Les photos de discours sont toujours prises d’en bas, pour rendre la personne plus puissante » note Jesper. Il confie que les discours prononcés par ses parents sont en réalité des banalités dites avec vigueur : « Je lui dis : Parle-moi juste de ta journée, dis-moi n’importe quoi, parce que c’est plus naturel s’ils parlent normalement. » Prenant de très nombreuses photos, il cherche à capter le moment parfait, qui reprendra le mieux les codes de la photographie politique. « Je veux vraiment qu’ils aient la bonne expression. »

 

Juste une mise en scène. Avec sa démarche, l’artiste veut que le monde réalise que les photos vues aux informations télévisées ou dans les journaux ne sont qu’une façade. « Il y a des gens qui ne savent pas à quel point les photographes influencent notre vision de Trump, Macron ou Merkel. » Les photos rendent leur sujet plus beau, fort, mou ou arrogant, afin d’appuyer les propos qu’elles accompagnent. Manipulant les photos à la façon des photographes politiques, Jesper Boot réalise Power pour prouver ses dires, et faire comprendre que ce que nous voyons dans les journaux et à la télévision ne sont que des mises en scènes. « Une photo devrait toujours raconter une histoire. »

 

BIO : Jesper Boot est un photographe néerlandais né en 1996. De 2015 à 2019, il suit une formation de photographie et design à l’université des arts d'Utrecht. Son inspiration principale lui vient d’observations de faits quotidiens, et de son intérêt pour l’actualité et la politique. Son travail, exposé à six reprises depuis 2018, a reçu les prix et nominations du Public Choice Prize and Honorary Mention, Steenbergen Stipendium en 2019, le Jury Prize International Photo Festival Leiden lors de sa 5ème édition et le GUP New Talent 2021. En 2021, il publie le livre de son projet Power.

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