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Frédéric Roels « L’opéra Grand Avignon, une maison de création »

par Véronique Giraud
Frédéric Roels, directeur de l'opéra Grand Avignon © Michaël & Cédric Studio Delestrade
Frédéric Roels, directeur de l'opéra Grand Avignon © Michaël & Cédric Studio Delestrade
Arts vivants Opéra Publié le 19/10/2021
Après une année 2020 en berne, la réouverture de l’opéra Grand Avignon, entièrement rénové et modernisé, signe également une vraie première pour Frédéric Roels, son directeur nommé fin 2019. Il a baptisé « Contre vents et marées » la saison 2021/22, qui débute le 14 octobre.

Quel est la singularité de l’opéra Grand Avignon ?

C’est une institution de dimension moyenne, mais sa force est d’être une maison de création. L’opéra Grand Avignon dispose d’un chœur et d’un ballet permanents, d’une maîtrise et d’un atelier couture, de résidences d'artistes. Ces forces vives permettent de produire des spectacles, notamment des nouveaux projets. Grand Avignon est donc souvent producteur ou coproducteur avec d’autres opéras. En tant que metteur en scène, c’est une dimension très importante. Je ne pouvais pas diriger un endroit limité à la diffusion de spectacles. Il fallait être force de propositions et d’inventions de formes.

 

Tout cela nécessite un budget important…

Nous avons un budget moyen de 9 M€. Il comprend le personnel, les équipements et la production. L’artistique représente à peu près 1,5 M€ de ce budget.

 

Sur quoi porte votre projet à la direction d’un tel lieu ?

Je suis très soucieux de la diversité des publics, de celle des formes aussi. Il faut ouvrir des portes. On a un répertoire d’opéra, mais il est important de provoquer les gens à la découverte de choses nouvelles. C’est comme cela qu’on arrivera à diversifier les publics, à toucher les gens là où ils sont. L’environnement social et culturel d’Avignon n’est pas celui de Lyon ni de Montpellier. Il faut prendre en compte les différentes cultures. J’aimerais qu’elles se retrouvent dans la programmation, tout comme les cultures urbaines, le rap, le hip hop. Je suis également très attentif aux démarches participatives de citoyens dans les spectacles.

 

Vous avez en effet expérimenté l’opéra participatif à Rouen…

C’est une des formes possibles, nous allons la proposer ici aussi. Il s’agit d’un opéra un peu réduit dans ses dimensions, dans un format d’environ une heure, qui comprend tous les ingrédients de l’opéra : un orchestre, des chanteurs, des décors, des costumes. Sa particularité c’est que le public, depuis la salle, est invité à participer au spectacle en chantant une sélection d’extraits musicaux intégrés dans l’opéra, qu’il a appris en amont. C’est une manière de vivre le spectacle en vivant, chacun à sa manière, l’expérience physique du chant.

 

À quel moment proposerez-vous la participation du public ?

Avec Carmen reine du cirque, que nous présenterons en janvier. Nous proposerons d’autres formes de participation. Avec le spectacle Peter Grimes, par exemple, qui a ouvert la saison, nous avons créé un club tricot dans lequel une quarantaine de personnes ont tricoté des pulls qui sont utilisés parmi les costumes sur scène. Ces personnes ont pu assister à des répétitions, ont rencontré les artistes, et ont été ainsi impliqués dans le processus de création. Il existe des tas de participations possibles, il faut les inventer.

 

Le prix des places d’opéra est peu abordable…

Cela dépend du type de spectacle. Il y a aussi des formules relativement peu coûteuses, notamment pour les jeunes. Toutes les places restantes en dernière minute sont vendues 10€, quelle que soit la catégorie. La formule en famille permet au parent de payer 6€ la place de son enfant.

 

Pourquoi ce choix de Peter Grimes pour la réouverture de la salle ?

D’abord parce que c’est un chef d’œuvre du XXe siècle. C’est un opéra très puissant qui n’a jamais été joué à Avignon. C’est beau qu’il vienne en ouverture de saison et en inauguration d’opéra parce que cette œuvre mobilise toutes les forces vives de la maison et les met en valeur. C’est un opéra choral, le chœur intervient énormément. La partition, difficile, est très valorisante pour notre orchestre. Et comme il s’agit d’une nouvelle production, les costumes ont été confectionnés dans nos ateliers. Même la scénographie, très mobile, avec des changements à vue, montre le travail des techniciens de l’ombre.

 

Le public est-il impatient de reprendre le chemin de l’opéra ?

On sent que l’effet de la crise du Covid a joué beaucoup. C’est une situation que vivent toutes les salles en France vivent. On espère que le goût du spectacle va revenir, que les gens auront l’envie et le courage de sortir de chez soi.

 

Dans la ville qui vit l’effervescence pendant son festival l’été, il doit aussi y avoir des grands moments de silence…

Oui, c’est le paradoxe. Avignon est effectivement une ville qui a une forte identité culturelle, portée par le festival, cinq théâtres qui fonctionnent toute l’année, des cinémas, l’opéra en centre-ville et L’autre Scène à Vedène. Pour une ville de moins de 100 000 habitants c’est exceptionnel. En même temps, cette dynamique doit s’entretenir dans la durée, doit se renouveler, se diversifier, parce que rien n’est gagné jamais.

 

Quelle est la programmation de l’Autre Scène ?

La programmation de l'opéra se décline sur deux lieux, permettant une grande diversité. Dans cette deuxième salle, la jauge est plus petite (420 places) et son grand plateau autorise des spectacles et des danses plus contemporaines. On y trouve aussi une programmation jeune public, des spectacles en famille, des expérimentations de musiques amplifiées.

 

Faites-vous appel à des artistes ?

Je suis très attaché aux résidences d’artiste. À Avignon, nous accueillons une compositrice, Joséphine Stephenson, dont plusieurs projets seront présentés tout au long de la saison. Elle est en train d’écrire son premier grand opéra, il sera programmé pour la prochaine saison de Grand Avignon. Nous accueillons également un duo de metteurs en scène, Sandra Pocceschi et Giacomo Strada, qui interviendront pour plusieurs formes, notamment l’opéra Idomeneo de Mozart au printemps. Autre compagnonnage artistique, celui avec l’artiste photographe Clara Chichin qui a fourni tous les visuels de la saison.

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