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Mot de passe oublié ?La Mer au loin conte l’histoire de Nour, jeune Marocain arrivé clandestinement à Marseille, à travers les rencontres successives qu’il fera et comment elles changeront sa vie. Saïd Hamich, son réalisateur, dont c’est le second long métrage après Retour à Bollène, sorti en 2018, est venu le présenter en avant-première devant le public du festival Premiers Plans. Le producteur et réalisateur confia alors qu’il n’était pas parvenu à trouver les mots pour expliquer l’expérience qu’il a connue lorsqu’il a quitté son Maroc natal pour la France à l’âge de 11 ans. « Je me suis rendu compte que l’exil est difficilement racontable » dit-il. Il ne se reconnaissait pas non plus dans les représentations maghrébines dans le cinéma français, et voulait réaliser et produire des films pour changer ça. La Mer au loin lui a permis de représenter le sentiment de l’exil, à-travers le personnage de Nour, qui arrive clandestinement à Marseille avec un groupe d’amis marocains et tente de s’en sortir au fil de contacts et d’opportunités.
Le cœur entre deux mondes. La Mer au loin s’ouvre sur Nour, interprété par Ayoub Gretaa, sur un bateau en pleine Méditerranée. Cette image illustre parfaitement le dilemme du personnage, qui tangue entre le Maroc et la France. Saïd Hamich souligne que « à aucun moment je ne dis que c’est une représentation de toutes les communautés maghrébines en France », ce qu’il a souhaité exprimer c’est son expérience. « Ce que j’essaie de faire avec le film, c’est donner un sentiment plus qu’expliquer, parce qu’expliquer, je n’y arrive pas ». Ne voulant cependant pas réduire ses personnages au seul statut de migrants, il a trouvé que le meilleur moyen de leur donner de la profondeur était la musique. Plus précisément, le raï. « La musique n’a aucun obstacle » déclare-t-il. C’est dans les années 90 que débute le film, et les musiques de cette époque transportent les spectateurs trente ans plus tôt. La Mer au loin se déroule sur plusieurs années, découpées selon l’évolution relationnelle de Nour, le protagoniste. « Pour découper le film, je me suis dit que ce qui comptait n’était pas les années mais les rencontres » explique Saïd Hamich.
Une histoire de rencontres. Nour est le narrateur de sa propre histoire. Sa personnalité se construit au fur et à mesure du film, par les gens qu’il croise et la manière dont ils affectent sa vie, en bien ou en mal. Le réalisateur voulait que ses personnages n’aient pas comme unique souci d’obtenir leurs papiers, mais également des problèmes plus intimes, liés à leurs relations. Afin de rendre son film plus inattendu, Saïd Hamich a également choisi de montrer des stéréotypes de films d’exil, et de les transformer afin que son public ne s’attende à rien. « J’ai construit le film comme une fausse piste » dit-il. Expliquant que faire un film, c’est faire des choix, et montrer une situation spécifique. Son intention n’est aucunement de faire des statistiques ou de montrer une réalité universelle, si une telle chose peut exister.
Un protagoniste effacé. Nour n’existe qu’à travers les autres, il est le narrateur et la caméra est son regard sur le monde. Pour ce rôle, Saïd Hamich cherchait un acteur ayant une grande capacité d’écoute et pouvant être filmé en jouant sans dialogues. L’acteur devait avoir une grande qualité solaire malgré sa profonde tristesse. Tout cela, il l’a trouvé dans le jeu d’Ayoub Gretaa. Ce dernier, étant marocain, n’avait pas à forcer un accent français ou à apprendre la langue, ajoutant au réalisme du personnage « il a fait la même trajectoire par rapport à la langue » dit le réalisateur. L’originalité du film est d’être construit par les rencontres et les relations qui transforment un homme en exil.