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Mot de passe oublié ?L’accession, mercredi 23 mai, de Giuseppe Conte, un juriste inconnu en politique, à la présidence du conseil italien risque bien d’être une date funeste pour l’Europe et la démocratie. Les deux partis populistes et autoritaires arrivés en tête des élections législatives du 4 mars dernier, la Ligue et le Mouvement 5 étoiles (M5S) qui ont passé un accord de gouvernement, ne cessent depuis quelques années de battre en brèche toutes les valeurs qui ont fait l’Europe et le progrès gigantesque qu’ont connu ses habitants depuis 60 ans d’existence.
Démocratie ? Le programme envisage dans le plus grand flou la désignation d’un « comité de conciliation » annoncé comme un gouvernement bis et la mise en place d’un mécanisme de révocation des élus que seul Mussolini a jamais osé en Europe. Comme sous Mussolini, les Francs-maçons n’auraient pas le droit d’entrer au gouvernement. Et les Imams seraient répertoriés.
Libertés ? Les maires membre de la Ligue refusent d’appliquer la loi sur le mariage pour tous, leur parti est aussi opposé à l’avortement. Les sorties des dirigeants contre la presse et la justice montrent leurs vœux d’en arriver à des restrictions dans ces domaines, comme en Pologne et en Hongrie.
Solidarité ? 500 000 migrants seront remis à la mer, les camps de Roms seront fermés.
Paix ? La politique qui a prévalu en Europe depuis 60 ans, assurant la paix à ses citoyens sera revue par les nouveaux dirigeants. Eux qui se disent nationalistes et souverainistes sont prêts à oublier leurs principes pour l’Ukraine et la Crimée et demandent la fin des sanctions contre la Russie.
Social ? Il ne s’agit bien sûr là que d’un aperçu. Écouter ou lire les déclarations de ces dirigeants ces dernières années est édifiant. Quant aux mesures sociales annoncées, elles ne sont tout simplement pas financées, les deux partis comptant sur une hypothétique explosion de la croissance pour payer un programme non chiffré et très flou que des experts indépendants chiffrent dans une fourchette de 100 à 170 milliards d’euros. Dans ces mesures, une baisse impressionnante des impôts qui bénéficierait en premier lieu aux plus riches avec seulement deux tranches d’imposition de 15% et 20% (contre 46% pour la plus élevée aujourd’hui), une allocation forfaitaire de 780€ mensuel pour les neuf millions d’Italiens les plus pauvres. Le programme signé par les deux partis ne fait plus mention d’une sortie de l’euro, mais prévoit une renégociation des traités.
L'opposition paralysée. Face à cette offensive musclée de retour en arrière, les mondes culturels italiens et européens restent dans l’expectative. Pas d’immenses manifestations comme en France contre Le Pen ou en Italie contre Berlusconi. Pas de fortes interventions de personnalités écoutées. Comme s’ils avaient un temps de retard, faute de n’avoir pas vu arriver la victoire des nationalistes, faute de n’avoir pas cru possible l’alliance des extrêmes, populistes du MS5 et nationalistes de la Ligue, faute de ne plus savoir où se situe la ligne de démarcation entre les valeurs humanistes et les valeurs rétrogrades et coercitives. Une opposition, qui se définissait entre républicains et royalistes au XIXe siècle, puis entre progressistes et conservateurs, enfin entre gauche et droite, peine aujourd’hui à se nommer, nationalistes et européens ne parvenant pas encore à rassembler des réalités et des utopies très disparates. Reste à savoir en faveur de qui joue le temps.