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Mot de passe oublié ?Il y a une difficulté structurelle à étudier les pratiques culturelles des jeunes, des adolescents et des adolescentes. C’est que le temps relativement long d’une enquête donne déjà aux résultats un côté dépassé. Une enquête poussée et complète sur la génération des 15 ans ne pourra voir le jour que lorsque les personnes enquêtées auront atteint l’âge adulte et qu’une nouvelle génération sera arrivée avec des pratiques culturelles différentes. Cela explique que la dernière enquête longue et profonde du ministère de la Culture sur ce sujet remonte à… 1992.
Pour tenter d’approcher les pratiques culturelles des jeunes, restent donc les sondages et la consommation. Les sondages ne sont guère nombreux. Une enquête récente de l’Insee nous apprend néanmoins qu’en 2022, contrairement à une idée reçue, les 16-29 ans sont les personnes qui accusent le plus de sorties à des fins culturelles. Trois sur quatre déclarent au moins une sortie par an alors que le pourcentage tombe à 38% pour les plus de 65 ans.
Des tranches d’âge variables. Se pose également la question des tranches d’âge. L’Insee a retenu les 16 à 29 ans, ce qui inclue pratiquement deux générations, l’une née alors qu’Internet n’était connu que des spécialistes, l’autre quotidiennement connectée à Tik Tok. Sensiblement même spectre de mesures chez les 18-30 ans, pour le Baromètre de la direction de la jeunesse de l'éducation populaire et de la vie associative réalisé sur une thématique différente à chaque édition par l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) et le Centre de recherche pour l’étude et l’observation de la consommation (CREDOC). La dernière publication porte sur 2019 et confirme l’attrait de la jeunesse pour la culture.
« Non seulement les 18-30 ans multiplient les activités culturelles, bien plus que l’ensemble des Français, mais ils les combinent par ailleurs en véritables « omnivores » culturels. Tout le contraire des préjugés tenaces qui les décrivent comme des consommateurs passifs et solitaires d’offres numériques, peu créatifs et peu curieux » notent ses six autrices et auteurs. Qu’on en juge, 86% des personnes interrogées assuraient avoir cumulé au moins une activité culturelle traditionnelle (cinéma, lecture, musée, spectacle…), une activité artistique créative (travaux manuels, danse, chant, peinture…) et une activité culturelle numérique (jeux vidéo en ligne, téléchargement de films ou de musique…) durant les 12 derniers mois.
Livres et arts vivants. Le Centre national du livre ne dément pas cette forte consommation culturelle des jeunes qui lisent autant que leurs parents et grands-parents. Tous les deux ans, le CNL publie le baromètre « Les Français et la lecture » et sa dernière parution apporte un bémol. SI 92% des 15-24 ans se définissaient comme lecteurs en 2019, ce chiffre est tombé à 80% et stagne à ce niveau depuis 2021. Autrement dit, 1 jeune sur 5 de moins de 25 ans déclare ne pas lire du tout.
Autres mesures possibles avec la fréquentation des festivals, mais là encore avec des tranches d’âge variables. Bien entendu la thématique de chacun d’entre eux n’est pas sans influence sur la moyenne d’âge des festivaliers. Ainsi au festival de musiques actuelles les Vieilles Charrues, qui a accueilli près de 300 000 personnes pour son édition 2023, la moyenne d’âge des festivaliers est de moins de 30 ans. Au Festival d’Avignon, qui publie régulièrement une étude sur son public, les moins de 26 ans représentaient 24,4% des ventes de billets en 2019. Après l’édition de 2021, les moins de 36 ans, et non plus les moins 26 ans, n’en représentaient que 16% (ce qui correspond à peu de choses près à la proportion de personnes âgées de 20 à 35 ans dans la population générale).
Le Pass culture. Étendu au 15-18 ans, le Pass culture offre un éclairage inédit sur les pratiques culturelles puisque la consommation afférente à la plupart d’entre elles sont quantifiables en réel et non plus en sondage. La publication en mai 2023 d’un rapport de la Cour des comptes sur l’utilisation du Pass culture donne de premières indications. Au 31 décembre 2022, plus de la moitié des dépenses effectuées à travers le dispositif doté de 290 millions d’euros était allée à l’achat de livres (52%). L’achat de billets de cinéma représentait 18% du budget total, 10% avaient été consacrés à l’achat d’instruments de musique, 5% à l’acquisition d’enregistrements musicaux, autant que pour la musique live, 3% pour l’achat de films, l’accès aux musées et aux spectacles vivants, particulièrement impactés par la crise sanitaire, représentant des pourcentages infimes.
Là encore, les chiffres datent. Les institutions travaillent à les obtenir en temps réel. Ce qui est possible par exemple dans la librairie où un logiciel recense les achats au jour le jour. Et là, surprise. Si l’on interroge les libraires, l’attrait pour la lecture est avéré, loin des seuls achats de jeux vidéo annoncés il y a sept ans par les premiers résultats du Pass culture. Mais un genre littéraire né il y a dix ans prédomine, la New romance. De quoi diligenter une étude, non ?