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Avignon Off : « Surexpositions », dans l’ombre de Patrick Dewaere

par Véronique Giraud
Une scène de SUREXPOSITIONS, pièce écrite par Marion Aubert et mise en scène par Julien Rocha, Cie Le souffleur de verre © Julien Bruhat
Une scène de SUREXPOSITIONS, pièce écrite par Marion Aubert et mise en scène par Julien Rocha, Cie Le souffleur de verre © Julien Bruhat
Arts vivants Théâtre Publié le 01/08/2022
La pièce "Surexpositions" scrute les regards portés sur un acteur dans l'après 68. Celui des réalisateurs, public, monde du cinéma, quand tout semble possible si on ne regarde pas de trop près. Tout semble possible, sauf pour Patrick Dewaere. Une belle surprise du Off !

Patrick Dewaere, vous vous souvenez ? Les cinéphiles et les plus de trente ans certainement, les plus jeunes le découvriront sans doute avec Surexpositions, pièce écrite par Marion Aubert et mise en scène par Julien Rocha. C’est ce dernier qui a passé commande à l’autrice de ce sujet ultrasensible qu’est Patrick Dewaere. L’acteur a déstabilisé la planète cinéma d'après 68 de son talent singulier, déstabilisé la planète média de cette époque par son refus de communiquer sur sa vie privée, déstabilisé le public par la violence de son suicide à 35 ans, le 16 juillet 1982, au sommet de sa notoriété et alors qu’il se préparait à endosser un nouveau rôle.

 

Le regard d’une autrice. Avec une telle comète, Marion Aubert aurait pu s’aventurer sur les chemins de l’hagiographie, et construire une nouvelle image d’artiste maudit. À travers les rôles de Patrick Dewaere, l’autrice a préféré sonder une époque, celle de la génération des Miou-Miou, Bouteille, Moreau et autre Depardieu, celle de réalisateurs que Dewaere a séduits, de Bertrand Blier à Claude Miller, André Téchiné, Henri Verneuil, celle des rapports hommes femmes, celle de rôles qui engageaient celui qui les incarnait, du voyou des Valseuses (1974) au macho de La Meilleure façon de marcher (1976) ou encore au vengeur-héros de Coup de tête (1979). Une époque où le public plébiscitait le comédien Dewaere alors que le monde du cinéma le nomina cinq fois mais ne lui accorda aucune reconnaissance officielle. Sondant l’époque et soupesant les regards portés sur un acteur au jeu ambigu, ne manquant pas de cynisme, et sur une personnalité à la fois violente et fragile. Surexpositions, c’est le regard d’une autrice du XXIe siècle porté sur une époque où la masculinité et la violence dominent, où la reconnaissance de l’homosexualité et la libération de la femme se frayent un chemin sur écran noir mais divise les spectateurs. Les répercussions sur l’acteur étaient parfois dramatiques, comme le rappelle la pièce où resurgit Patrick Bouchitey, qui fut black-listé par le cinéma après avoir incarné le souffre-douleur de Dewaere et éclairé la douleur d’être homosexuel.

 

L’œil du metteur en scène - réalisateur. La mise en scène de Julien Roucha permet de switcher d’une scène culte à une autre, le décor fonctionne et évolue au rythme d’un travelling. Sans caméra, l’œil du metteur en scène - réalisateur est omniprésent. Il guide les mouvements du décor, place les comédiens, projette la lumière sur une scène imaginée ou copie conforme de  celle d’un des films devenus cultes.

Les mots composés par Marion Aubert tiennent de son amour du théâtre et ses comédiens. Ils sont pressentis pour leur bouche, leur corps, et chacun des quatre comédiens endossant plusieurs figures du cinéma, leurs capacités à produire et reproduire différentes intonations. Dans Surexpositions, ces mots font merveille et dessinent des figures qui téléportent le spectateur dans le jeu même de comédiens d’une époque révolue, celle où l’acteur Patrick Dewaere joua sa vie, sans fard.

 

Surexpositions (Patrick Dewaere), du 7 au 30 juillet au Théâtre de l'Oulle, Avignon, à 21h40. Écriture : Marion Aubert. Mise en scène : Julien Rocha. Avec Margaux Desailly, Johanna Nizard, Fabrice Gaillard, Cédric Veschambre.

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ENTRETIEN AVEC MARION AUBERT
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